A l’approche des élections régionales de décembre 2015, Films en Bretagne s’est adressé aux femmes et aux hommes qui sollicitent actuellement les suffrages des citoyens. Comment considèrent-ils la culture en région ? Quelles sont leurs ambitions en matière d’audiovisuel et de cinéma ? Et leur vision concrète d’un développement décentralisé de ce secteur ?

Aujourd’hui, la rédaction rencontre Sylvie Larue, tête de liste d’Ille et Vilaine « Front de gauche ».

 

Pour rappel : Un questionnaire a été envoyé début octobre aux partis en lice. Lutte Ouvrière et sa tête de liste en Bretagne, Valérie Hamon, n’ont pas souhaité s’exprimer. Le Front National et Bretagne en luttes n’ont pas répondu à nos sollicitations. Six entretiens ont été réalisés entre le 5 octobre et le 5 novembre. Les suivants se sont déroulés après la parution des listes inscrites officiellement auprès de la Préfecture de Région.

Les réponses ont été recueillies oralement, synthétisées, puis validées par chaque candidat. Cette série d’entretiens est publiée dans l’ordre de réponse à nos sollicitations. Une infographie clôturera ce dossier « Régionales 2015 », reprenant de façon synthétique les grands thèmes abordés par chaque candidat.

 

Sylvie Larue est professeur d’éducation physique et sportive à Liffré, près de Rennes. Elle est la tête de liste en Ille et Vilaine pour le Front de gauche, une coalition qui réunit aujourd’hui trois principaux courants : le parti communiste, le parti de gauche emmené par Jean-Luc Mélenchon, et le mouvement Ensemble ! de Clémentine Autain. Appartenant à cette dernière mouvance, Sylvie Larue a élaboré son programme culturel régional au cours d’ateliers collectifs, et tient à préciser avant tout que celui-ci est évolutif.

 

« Notre maître mot est la co-construction, c’est une autre conception de la politique, l’élu est un partenaire du citoyen. Notre ambition est de combler ce gouffre qui se creuse actuellement entre l’électeur et la représentation politique. »

 

– Films en Bretagne : Quelle place tient la culture dans votre programme ?

Une place centrale. C’est ce qui nous permet de comprendre le monde et le transformer ! C’est également un outil de promotion sociale, de partage. La Bretagne est une terre du « bien vivre ensemble », et ce n’est pas un hasard si elle détient le record absolu de festivals, avec un maillage exemplaire d’associations, sur tout le territoire. Quand les touristes viennent ici, ce n’est pas seulement pour le décor. Quand je pense à notre politique culturelle, c’est un tout : il s’agit de lutter contre la marchandisation, donner de l’égalité d’accès à cette culture, de créer de nouveaux espaces de gratuité, soutenir la création, les intermittents,  les associations, développer la formation.

– Quel projet audiovisuel et cinématographique avez-vous développé ?

Aujourd’hui, en matière de médias, il faut donner la priorité au service public, fragilisé par la pression politique et financière. En région, au sein de France Télévisions, les décisions ont été confisquées, depuis dix ans on a vu l’autonomie et les moyens baisser. France 3 Régions doit redevenir le premier investisseur en matière de création. On peut aussi imaginer des liens avec les autres télévisions locales existantes, mais notre projet est de créer une chaîne premium, de plein exercice, avec un véritable programme régional. Avec non seulement de l’information régionale, mais aussi de la création, de la production en région. Cet outil doit être géré de manière démocratique, avec une véritable représentation du public, des salariés au sein du conseil d’administration, et une véritable indépendance éditoriale, y compris vis à vis du Conseil régional. Et pour le financer, la redevance doit être collectée au niveau régional. Ce fléchage régional de la redevance évitera la déperdition, l’évaporation des moyens. Ce qui n’empêche pas une syndication entre les différentes chaînes régionales : par exemple, la Bretagne pourrait produire deux téléfilms par an, et les faire circuler dans les autres régions.
Au niveau de la formation, il y aussi des maillons faibles dans le secteur audiovisuel breton : il manque des cursus post-bac, comme à Montaigu, type BTS ou IUT, très professionnalisants, dans le secteur public.

– Comment voyez-vous l’évolution des fonds d’aide et du budget global alloué à ce secteur ?

Le budget alloué au cinéma et à l’audiovisuel a augmenté ces dernières années, nous nous engageons à ce qu’il continue de progresser.  Globalement, nous voulons mettre un terme à la diminution des dépenses publiques. Il est positif que ces fonds d’aide soient gérés en concertation avec les professionnels du secteur.

– Est-ce que l’on peut imaginer des aides économiques aux entreprises du secteur, maintenant que les régions ont une compétence en ce domaine ?

Pourquoi pas, pour notre part nous défendons l’idée que ces aides soient conditionnées à de véritables créations d’emploi, à des pratiques vertueuses comme l’égalité salariale, l’écologie, et en favorisant l’économie sociale et solidaire, donc en priorité les Scop et les Scic. La Région doit également demander aux banques mutualistes, comme la BPO, le CMB, d’injecter plus de moyens dans ce secteur culturel, ou relevant de cette économie non axée sur le profit à court terme.

– Quelle est la place des langues régionales selon vous ?

Il faut continuer le fonds d’aide spécifique qui soutient ce secteur, et surtout privilégier la création originale en breton, plus que le doublage. Cela suppose de développer aussi des liens avec l’éducation nationale, les formateurs. Il faut s’inspirer des autres régions plus avancées que la Bretagne en la matière.

– Quelle expérimentation imaginez-vous au niveau régional, dans le cadre par exemple du pacte d’avenir ?

Je reviens à notre projet de chaîne régionale de plein exercice, relevant du service public, indépendante politiquement, et cogérée par les bretons, le public et les professionnels. Avec comme critère ultime, non pas de faire l’audimat, mais surtout la création, la recherche de sens.

– Quelle gouvernance proposez-vous pour gérer ce secteur ?

Encore une fois, nous sommes des adeptes de la co-construction, ce projet peut évoluer, il doit y avoir un débat public, en toute transparence. Et les professionnels doivent être les premiers impliqués.

Propos recueillis et photographie par Brigitte Chevet

A venir , l’ entretien réalisé auprès de :

  • « Notre chance l’indépendance »

 

Lien(s) en relation avec ce sujet

 

Le questionnaire envoyé aux candidats des différentes listes bretonnes pour les élections régionales 2015.

 

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Liens vers les entretiens réalisés dans le cadre de cette campagne Régionales 2015 :

  • Jean-Jacques Foucher, tête de liste « Debout la France »
  • Isabelle Le Bal, 3ème (Finistère) sur la liste « Le choix de la Bretagne », Républicains/Modem/UDI/régionalistes
  • Didier Chapellon, 2ème (Ille et Vilaine) sur la liste verte « Une autre voie pour la Bretagne », Europe Ecologie Les Verts, Bretagne Ecologie et des non encartés
  • Christian Troadec, tête de liste « Oui la Bretagne »
  • Jean-Michel Le Boulanger, 5ème (Morbihan) sur la liste « La Bretagne avec Jean-Yves Le Drian », PS et apparentés
  • Jean-François Gourvenec, tête de liste de « l’Union Populaire Républicaine en Bretagne »
  • Sylvie Larue, tête de liste en Ille et Vilaine  « Front de gauche »
  • Bertrand Déléon, tête de liste « Notre chance l’indépendance »