«  PLUS DOUCE EST LA NUIT » : Témoin de la fin d’un monde ?


De retour d’Annecy, Isabelle Vanini, déléguée générale de l’AFCA, a vu Plus douce est la nuit de Fabienne Wagenaar en grande salle de Bonlieu, pour la séance officielle… Elle nous parle d’une grande rencontre.

 

Retour d'écran

Après une formation d’illustratrice à l’école Estienne à Paris et aux Arts Décoratifs de Strasbourg, Fabienne Wagenaar poursuit son parcours à La Poudrière, dont elle sort diplômée en 2014. Elle réalise Carte Postale, à partir d’un poème d’Apollinaire, pour le programme « En sortant de l’école », qui se déroule pendant la première Guerre mondiale. 

En lisant le dossier de présentation de son court métrage professionnel il y a quelques années, lors d’une commission, je me suis dit que cette jeune réalisatrice témoignait d’un intérêt certain pour les sujets historiques puisque Plus douce est la nuit aborde la difficile question de la décolonisation en Afrique de l’Ouest dans les années 60. Un sujet complexe, beaucoup de personnages (des officiels français, un militaire arrivant de la métropole, un missionnaire disparu, des colons sur le départ, des habitants africains hostiles), des décors chargés, le tout réalisé en peinture animée et en animation directe : un film ambitieux et « casse-gueule » comme on dit.

J’ai eu le plaisir, en avril dernier, de pouvoir assister à la projection d’équipe organisée par JPL Films et de découvrir le film sur grand écran. Non seulement, il était réussi, mais au-delà de ce que j’avais pu imaginer. La visite des studios deux jours plus tard m’a permis d’apprécier la beauté des peintures de la réalisatrice, donnant immédiatement l’envie de monter une exposition.

Revoir le film dans la grande salle de Bonlieu, en séance officielle, fut un plaisir renouvelé. Je l’ai même redécouvert. Comme tous les grands films, il faut le voir et le revoir pour en apprécier toute la subtilité et la réussite.

Fabienne Wagenaar qui a travaillé sur La Traversée avec Florence Miailhe, signe un film en peinture animée remarquable. Le travail sur les couleurs (qui permet d’identifier chaque personnage, et notamment cette petite fille au ruban jaune qu’on n’oubliera pas de sitôt), les lumières (aveuglante à l’extérieur de la ville portuaire, sombre et étouffante dans les intérieurs ou lorsqu’on pénètre dans la forêt), les décors très documentés et détaillés (la réalisatrice est partie en Côte d’Ivoire un mois), la mise en scène (peu de gros plans, des plans d’ensemble renforçant le côté perdu et observateur du personnage principal), la maitrise de la technique m’ont enthousiasmée.

Le spectateur⸱rice épouse le point de vue du jeune officier de l’Armée française qui mène une enquête qui lui échappe dans un monde inconnu qui résiste. Quel personnage sera la porte d’entrée vers la découverte de la vérité sur cette disparition ? Cette femme en blanc ? La petite fille ? Le sculpteur ? Le mystère est palpable. La séquence de la forêt (qu’on ne révèlera pas) est d’une grande puissance. Le film se termine chargé d’une grande émotion, l’officier à jamais marqué par ce voyage initiatique, témoin de la fin d’un monde.

Isabelle Vanini, juin 2024


LE FILM

Plus douce est la nuit de Fabienne WAGENAAR

Afrique de l’Ouest, début des années 1960 : un officier français est chargé de retrouver un missionnaire disparu. Son enquête, entre méfiance, silence et préjugés, le conduit loin de la lumière des rivages, là où le jour et la nuit se confondent.

18 minutes • France • 2024
Réalisation : Fabienne WAGENAAR • Scénario : Fabienne WAGENAAR • Décors : Fabienne WAGENAAR, Marine DILLARD, Anne-Sophie RAIMOND • Animation : Fabienne WAGENAAR, Mathilde PARQUET, Paola DE SOUSA, Cécile MILAZZO • Caméra : Fabrice RICHARD, Damien BUQUEN • Musique : Julien DESAILLY • Son : Jan VYSOCKY • Montage : Jean-Marie LE REST • Voix : Alexis BALLESTEROS, Patrick MESSE, Baas DEHM, Isabelle DESPLANTES, Isabelle CHARLES, Mariam KABA, Yéliba Mélodie KOETA, Diouc KOMA, Jean-Marc PANNETIER, Adama KOETA, Thierry D’ARMOR, Massimo RIGGI, Claude VENTRILLARD, Louis-Léon LECONTEProduction : JPL FILMS, Jean-François BIGOT, Camille RAULO avec les soutiens du CNC, de la Région Bretagne

Retrouver le making of réalisé par la NEF Animation