Le tribunal de commerce de Lorient a rejeté le plan de redressement présenté par la chaîne locale morbihannaise au profit de l’offre proposée par le Télégramme de Brest. Le groupe de presse renforce ainsi sa position dans l’audiovisuel, étant l’actionnaire principal de la chaîne finistérienne Tébéo et, désormais, de Ty télé. Entretien avec Olivier Clech, directeur général du pôle multimédia du groupe Télégramme.
– Comment le tribunal de commerce de Lorient a-t-il motivé sa décision ?
– Olivier Clech : ce qui a pesé, je crois, c’est la solidité financière de notre offre et celle du groupe Télégramme qui est un gage de pérennité. Nous avons proposé la création d’une société d’exploitation, baptisée Télé Bretagne Sud, dont le Télégramme sera l’actionnaire principal à hauteur de 50%. Le tour de table réunit, par ailleurs, une bonne vingtaine de sociétés parmi lesquelles le Football Club de Lorient et Groupama, partenaires majeurs en terme de notoriété et d’audience, Breizh Cola, ou encore l’hôtel Mercure de Vannes et la Fédération du bâtiment du Morbihan. Toutes ces entreprises sont solidement implantées localement et ont un véritable intérêt à ce qu’un média dédié à ce département se développe. Nous espérons que de nouvelles sociétés vont entrer dans le capital. Par ailleurs, un autre argument majeur a été la préférence exprimée par le personnel de Ty télé pour l’offre présentée par le Télégramme.
– Dans un contexte de difficultés économiques pour la presse quotidienne, dont les recettes publicitaires diminuent, pourquoi le groupe Télégramme a t-il décidé d’investir dans une chaîne locale ?
O.C. : c’est quand ça ne va pas pour le mieux qu’il faut aller de l’avant. La philosophie du groupe Télégramme a toujours été de prendre des risques et c’est ainsi que nous avons réussi à nous en sortir un peu mieux que les autres. C’est la première raison. La seconde, c’est que nous sommes depuis longtemps un groupe multimédia engagé dans la communication. Nous avons une agence de conseil en comm’, plusieurs publications dont un mensuel national d’économie et évidemment le quotidien, et nous possédons une régie publicitaire. Il y a donc une logique à compléter ce dispositif grâce à un canal qui nous permet de valoriser notre savoir-faire éditorial, d’être présent sur nos territoires et de nous diversifier. L’expertise dans le domaine de l’audiovisuel est un atout, à l’heure de la télévision connectée. D’ailleurs, les deux chaînes possèdent déjà leur propre site internet. Tébéo fait partie du bouquet d’Orange et nous avons le projet de faire évoluer le site internet de Ty télé. C’est une voie de développement nécessaire pour toucher davantage de publics.
Enfin, – troisième raison -, le Morbihan est une terre de développement sur laquelle le Télégramme continue à engranger des résultats positifs. La télévision est donc aussi le moyen d’accentuer ce développement.
– Quelles sont les conditions de la reprise ?
– O.C. : Nous reprenons Ty télé pour un montant de 40 000 euros. C’est faible, mais nous avons estimé qu’il fallait mieux garder nos forces pour l’avenir. En revanche, 6 des 7 salariés sont repris et nous allons créer 2 postes supplémentaires, ce qui permettra de retrouver l’effectif initial de Ty télé. L’équipe sera dirigée par Bertrand Le Néna, actuellement directeur des rédactions du Télégramme dans le Morbihan, qui sera le directeur délégué de la chaîne dont nous allons changer le nom. Elle pourrait s’appeler Télé Bretagne Sud ou quelque chose d’approchant. Dans les cinq prochaines années, la société d’exploitation va investir 2 millions d’euros dont 500 000 euros dans le capital et 1,5 million d’euros en achats d’espaces publicitaires et de communication. La chaîne fonctionnera avec un budget annuel de 1,1 million d’euros. Ce sont de très petits moyens que nous essaierons de compenser par une approche différente.
– Qu’est ce qui va changer d’un point de vue éditorial ?
– O.C. : Nous n’allons pas révolutionner la chaîne qui va rester un média de proximité. Il ne s’agit pas de dupliquer Tébéo. Chacune des chaînes gardera son identité propre, son indépendance éditoriale. Nous allons mutualiser les programmes que nous jugerons pertinents pour les deux territoires, par exemple l’émission culinaire « Bien dans votre assiette » ou celle sur les Bretons expatriés. Nous pourrons aussi mutualiser des moyens humains et techniques pour faire des économies d’échelle. Ty télé continuera, à travers ses programmes d’information et ses magazines, à refléter l’actualité du département, mais de manière moins institutionnelle que ça ne l’était. Cela dit, nous allons essayer de nous inspirer du ton spontané de Tébéo qui a trouvé son public et une forme de symbiose avec son territoire.
– Le groupe Télégramme est désormais l’actionnaire principal de deux chaînes locales ? Quelles conséquences cette nouvelle donne va-t-elle avoir sur l’unité de programme régionale (UPR) constituée par TVR, Tébéo, Ty télé et Armor tv ?
– O.C. : Le Télégramme est actionnaire de Tébéo à 42 % et de Ty télé à 50%. Les deux chaînes forment à elles deux le pôle Ouest de l’UPR. Nous avons des relations de confiance avec TVR qui a joué un rôle décisif dans la création de l’UPR. La reprise de Ty télé qui était le maillon le plus fragile va permettre de consolider l’édifice.
Propos recueillis par Nathalie Marcault
Photo : Olivier Clech, directeur général du pôle multimédia du groupe Télégramme