Traverser et se laisser traverser…


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Il a pris la direction de Cinécran (Vannes) il y a quelques mois déjà, dans un contexte tendu : en termes d’agenda – il arrivait quelques semaines avant les Rencontres du Cinéma Européen -, mais également d’organisation – une organisation qui devait regagner en sérénité tout en déménageant ses locaux.

Un désir de cinéma chevillé au corps, un sourire enthousiaste et engageant, un parcours fait de rencontres et d’expériences fondatrices… Voilà des éléments qui semblent plutôt bien caractériser Olivier Calonnec… Nous avons voulu en savoir plus, faire connaissance et lui souhaiter la bienvenue.


Au regard de ton parcours, et de tes multiples expériences, peux-tu essayer de te présenter « brièvement » ?

Je suis un finistérien qui arrive dans le Morbihan ! J’apprends à découvrir le territoire… La Bretagne vers laquelle je reviens…
Pour revenir en arrière, je suis passé par Rennes 2 en 2001 et terminé mon cursus avec un mémoire accompagné par Gilles Moalic autour de Princesse Mononoké. Déjà à cette époque, j’ouvrais quelque chose que je ne connaissais pas et m’engageais, sans vraiment le savoir, sur un chemin : devenir « passeur » et partager ma curiosité, pour « cultiver » quelque chose ensemble.
Rétrospectivement, et toujours aujourd’hui, je m’aperçois que je cherche à réunir les conditions pour continuer de me laisser traverser.

A Lyon, je travaillais au sein d’une association qui faisait la promotion de la vidéo comme moyen de s’approprier le territoire… Nous sommes en 2007. En parallèle, j’étais bénévole au sein de l’association qui administrait le cinéma Le Zola à Villeurbanne – on a tendance à l’occulter, mais Villeurbanne, c’est tout de même un territoire de quelque 150.000 habitants ! Puis j’ai monté un festival de courts à Grigny… ça m’a permis de découvrir comment ça marche, de me former pour les expériences d’après…

En intégrant le GRAC (le GROUPEMENT RÉGIONAL D’ACTIONS CINÉMATOGRAPHIQUES est une association de salles de cinéma de proximité classées Art et Essai ou ayant vocation à l’être, situées en grande partie sur le Rhône, l’Ain et la Loire), j’ai ensuite découvert l’exploitation : je suis arrivé pratiquement « en novice » quand j’ai repris le Zola après le départ de son directeur historique (Laurent Hugues a été 23 ans à la tête de cette salle). J’ai essuyé les plâtres : programmation de la salle et de ses trois festivals, RH, gestion du bâtiment… Mais, on affichait tout de même 83.000 entrées avec un mono écran ! Et je ne suis pas peu fier de ce que nous sommes parvenus à construire collectivement.

 

Pourquoi on revient en Bretagne ? Et dans un contexte plutôt particulier…

On revient en Bretagne parce qu’on est breton ! (sourire) Au-delà de cela, le projet Cinécran m’intéressait et continue de m’intéresser par-delà les étapes chaotiques…
Il faut se rappeler qu’à l’époque de mon arrivée, il y avait une interrogation réelle quant à l’avenir de Cinécran, dans un contexte de crise : départs successifs, ressources humaines, important volume d’activité (programmation, festival…), locaux de l’association et lieu du festival… Je me suis formé au management de projet culturel et me sentais solide pour ce challenge.

Ces dernières semaines, nous avons beaucoup réfléchi sur la question de la gouvernance, en étant attentifs à des enjeux cruciaux comme renouer avec les adhérent·es, et composer avec les caractéristiques du territoire. Nous sommes capables de relever ces défis, parce que nous avons tout de même une certaine assise financière. Nous avons d’ailleurs plus de moyens aujourd’hui, ce qui nous a permis de financer un troisième poste – qui reste à consolider certes – mais qui est une condition pour la conduite de notre activité foisonnante, entre programmation, coordinations diverses et festival !

Nous sommes aujourd’hui installés dans nos nouveaux locaux – que la mairie de Vannes met à la disposition de Cinécran, ce qui témoigne d’un soutien sans faille de la collectivité… Nous allons rendre ce lieu accueillant et faire en sorte qu’il nous ressemble. Je vois l’avenir de manière enthousiaste et optimiste !

 

Après quelques mois à la direction de Cinécran, peux-tu nous dire comment tu te projettes ? Avec quelle boussole ?

Il faut être assez fort pour être à la hauteur des enjeux… Aujourd’hui, et dans la continuité de mon parcours, je m’attache à cette idée d’amener le public, en impliquant les bénévoles, dans un partage de la culture… C’est véritablement un « corps social » qui doit bouger, dans un principe de digestion des œuvres. L’analogie avec le langage corporel et organique n’est pas anodine pour moi, j’aime évoquer les principes de « digestion », de « transpiration »… Il ne faut pas oublier que nous, acteurs culturels programmateurs, sommes les premiers spectateurs et premières spectatrices. Nous sommes celles et ceux qui peuvent « rendre » quelque chose de l’objet sensible de l’œuvre, quelque chose du territoire.

Si on parle de « boussole », je considère qu’il s’agit d’épouser les codes d’une époque pour « déconstruire »… J’aime assez l’idée d’une culture « liquide » , où nous-mêmes avons cette souplesse de rester toujours en prise avec les évolutions du monde, pour, tantôt, contrecarrer leur lecture toute faite, tantôt les accompagner. En quelque sorte, il s’agit d’arrêter d’être « productif » dans une salle de cinéma, pour partager une forme de « spiritualité » – je ne sais pas si c’est le bon mot, en tout cas pour partager quelque chose qui nous parle différemment aux un·es et aux autres, mais qui nous réunit.

 propos recueillis par Franck Vialle, directeur de Films en Bretagne le mardi 24 mai 2022


En savoir plus sur cinécran

Basée à Vannes, Cinécran est une association départementale qui œuvre pour la valorisation et la diffusion de la culture cinématographique :

  • Faire découvrir à un large public le cinéma d’auteur via des programmations, des actions de médiation, des évènements spécifiques
  • Mettre en place prioritairement des actions de programmation, de médiation, d’accompagnement, permettant la découverte et la compréhension des œuvres
  • Accompagner le jeune public dans son apprentissage du cinéma pendant son parcours scolaire
  • Favoriser la découverte de la jeune création cinématographique, sous toutes ses formes
  • Concourir à la mise en place d’actions partenariales locales (Ville de Vannes, Golfe du Morbihan – Vannes agglomération, Département du Morbihan, Région Bretagne) visant à promouvoir le cinéma d’auteur

Cinécran mène ainsi des activités tout au long de l’année :

  • Une sélection hebdomadaire de films art et essai au Cinéville Garenne
  • Des animations en salles de cinéma et des séances spéciales (Leçon de cinéma, rencontres, Ciné-concerts…)
  • Le Mois du film documentaire en novembre
  • Les Rencontres du cinéma européen en mars
  • La coordination du dispositif Ecole et Cinéma
  • L’organisation des formations Collège au cinéma
  • Des rendez-vous cinéma en écho à l’agenda culturel local (Music’Act, Livr’à Vannes, Jazz à Vannes…)

cinecran.org