QIFF, le festival qui porte bien son nom [trois questions à CLAIRE GAILLARD]


Il est très tentant de faire un jeu de mot avec l’acronyme du Quimper international film festival ! C’est vrai qu’il va bien avec son homonyme qui nous évoque la notion de plaisir et d’amour. Ce festival porte bien son nom.

Claire Gaillard a la passion du cinéma et de la transmission chevillée au corps et au coeur. Responsable artistique du festival, elle nous présente la programmation de cette année. 

 

 


Du 1er au 5 février prochain aura lieu la 2e édition du Festival QIFF à Quimper. Pouvez-vous nous présenter les sections de programmation et leurs particularités ?

Le QIFF poursuit le travail mené à l’année par Gros Plan en direction des publics jeunes et de l’éducation artistique. Dans cette optique il souhaite mettre en avant les réalisatrices et réalisateurs de demain. C’est pourquoi la compétition Jeunes Talents met en avant uniquement des premiers longs métrages. Dans cette idée également, le jury est composé de jeunes. Cette année ils sont six, de 20 à 22 ans, pour la plupart en parcours cinéma. Afin de les accompagner, ils sont épaulés par nos parrains et marraines. L’an dernier Guillaume Brac et Cristèle Alves Meira s’étaient prêtés à l’exercice, cette année le duo d’invités d’honneur est composé de Sébastien Betbeder et de Lisa Diaz. Une catégorie présente certains de leurs films, l’occasion de revoir ou de découvrir leur filmographie !

« L’une chante, l’autre pas », long métrage d’Agnès Varda © Paradise Films

Une autre section, « Où va le monde », présente six films en avant-première. Qu’ils utilisent la prise de vue réelle ou l’animation, ils dessinent chacun à leur façon un portrait de notre époque. Le cinéma de répertoire a également une place de choix dans le festival car on ne peut pas s’intéresser au cinéma de demain si on ne regarde pas d’où il vient ! L’idée est d’éditorialiser les propositions. Ainsi nous proposerons deux « parcours » : l’un autour de Sueurs froides d’Alfred Hitchcock, La jetée de Chris Marker et Mulholland Drive de David Lynch pour montrer comment le film d’Hitchcock a inspiré les réalisateurs par la suite. Un autre parcours, « Elles tournent, les révoltées ! » s’intéresse aux figures féminines fortes : Les petites marguerites de Véra Chytilova, L’une chante, l’autre pas d’Agnès Varda et La fiancée du pirate de Nelly Kaplan. A l’heure où l’on questionne la place des femmes dans le cinéma il est important de revenir sur ces personnages de femmes fortes, révoltées mais joyeuses !

Le format court n’est pas oublié, avec notamment une nouvelle fenêtre sur les courts venus des plateformes internet. Il y a une créativité énorme, sur Youtube notamment. Par économie de moyens, par urgence aussi, des réalisatrices et réalisateurs ont réalisé et produits des courts pour le web, avant qu’ils ne tournent en festivals. Le CNC encourage d’ailleurs cette création avec le dispositif CNC Talents. Nous présenterons donc 4 courts métrages dans ce cadre. Les clips continuent également d’être à l’honneur avec la troisième édition du QIFF du Clip, un rendez-vous festif qui rassemble musiciens, réalisateurs et festivaliers au cours d’une soirée bien animée. Toujours du côté des courts métrages nous continuons cette année le travail amorcé l’an dernier avec Marie Diagne de l’association Le cinéma Parle en présentant un programme de films courts sur lesquels elle a déjà travaillé, notamment dans le cadre de programmations du Festival Européen du Film Court de Brest. L’idée est que l’audiodescription soit accessible à toutes et tous, sans casque, pour une séance plus inclusive. Ce programme de courts s’intègre également dans la nouvelle section du festival « Ecouter le cinéma ».

Le travail autour du son est un axe fort dans vos choix artistiques cette année, pourquoi ?

Le son est souvent un grand oublié alors qu’il est vraiment essentiel ! On accueille des réalisateurs, des comédiens, des scénaristes… jamais celles et ceux qui « font » le son du film. Et pourtant il s’agit d’un travail essentiel. On le voit bien d’ailleurs en échangeant avec les élèves en option cinéma audiovisuel (Gros Plan est partenaire culturel d’options) : c’est souvent avec le son qu’ils rencontrent le plus de difficulté dans leurs réalisations pour le bac. C’est ainsi qu’est née l’envie de créer cette section dans la programmation : « Écouter le cinéma ». Daniel Deshays, ingénieur et concepteur sonore, s’est vite imposé comme une évidence ! Il viendra dispenser une masterclass le jeudi matin. C’est une proposition que nous avons également faite à Longueurs d’ondes, qui organise le Festival de la radio et de l’écoute à Brest, aux mêmes dates que celles du QIFF. Un rapprochement entre nos deux festivals semblait tout à fait cohérent et Daniel Deshays interviendra donc la veille à Brest. Quant à Longueurs d’ondes, ils nous ont proposé la venue de Tony Hayère qui viendra présenter son documentaire sonore Être mort, lors du QIFF. Une proposition sera également faite aux plus jeunes avec une séance-atelier autour du film Wall-E, d’Andrew Stanton : munis d’objets recyclés et accompagnés par le musicien John Trap, ils expérimenteront la création d’ambiances sonores. Et enfin bien-sûr, la carte blanche à Films en Bretagne ! Depuis l’an dernier, il y avait pour projet de construire une programmation commune. L’intérêt pour le travail autour du son rejoignant les envies et projets de Films en Bretagne, le directeur Franck Vialle a lancé une invitation à la société de production À perte de vue. Nous aurons donc le plaisir de présenter en avant-première le très beau documentaire Où va le blanc quand la neige fond ? de Guillaume Kozakiewiez suivi d’un échange « work in progress » entre le réalisateur et le compositeur de la bande son du film, Eric Thomas.

Où va le blanc quand la neige fond ?
"Où va le blanc quand la neige fond ? " documentaire de Guillaume Kozakiewiez © A perte de vue

Quels sont vos films coup de cœur de la programmation cette année, et pourquoi ?

Il m’est difficile de parler de mes coups de cœur car ils ont tous une bonne raison d’être présentés et programmés !  Évidemment j’ai une affection certaine pour Alma Viva qui est le premier long métrage de Cristèle Alves Meira. Elle était notre marraine l’an dernier, avec ses courts métrages elle avait déjà su imposer un univers cinématographique très fort que l’on retrouve dans son premier long. C’est une réalisatrice à suivre !

« Astrakan » long métrage de David Depesseville © Tamara Films

Mais il y a beaucoup d’autres films à découvrir sur le festival : le grain de la pellicule et l’atmosphère vénéneuse d’Astrakan de David Depesseville, l’adaptation animée et talentueuse de nouvelles de Murakami dans Saules aveugles, femme endormie de Pierre Foldes, le tendre triptyque sur la jeunesse queer dans Les garçons de province de Gaël Lépingle… la liste de mes coups de cœur est bien trop longue, j’espère maintenant qu’ils seront vus largement et partagés !

 

 

Propos recueillis en décembre 2022 par Cécile Pélian,
coordinatrice communication & réseau de Films en Bretagne