»Passer l’hiver » sous les rayons bretons


Vendredi 11 octobre au cinéma Quai des images de Loudéac, se tenait la première édition d’un rendez-vous appelé à se renouveler :  »Le Soleil se lève à l’Ouest ». Initié par la Région Bretagne, l’événement vise à faire connaître l’action qu’elle développe en faveur de la création cinématographique. Un panorama de films récents, soutenus par la collectivité, était projeté à l’intention des scolaires, des professionnels et du public. Le film d’Aurélia Barbet « Passer l’Hiver » était présenté en avant-première.

« Faut pas se dégonfler ! ». C’est la morale de l’anecdote choisie par Jean-Michel Le Boulanger lors du pot de clôture de la journée Le Soleil se lève à l’Ouest. Devant lui, les professionnels – ravis – et une nouvelle fois rassérénés par les propos du vice-président à la Culture du Conseil régional de Bretagne. L’élu est venu leur dire combien il était « fier » de cet engagement au profit des films et de tous ceux qui les façonnent : auteurs, producteurs, techniciens et comédiens. Parmi les films aidés par la Région Bretagne, dans le cadre du Fonds d’aide à la création cinématographique et audiovisuelle (FACCA) et présentés ce jour, il y avait Passer l‘Hiver, le premier long métrage d’Aurélia Barbet qui a obtenu un soutien à hauteur de 150 000 euros. Entre deux séances, nous nous sommes entretenus avec la réalisatrice qui avait fait le voyage depuis Marseille. Faut pas se dégonfler ? CQFD !
Le cinéma en région : Aurélia Barbet sait de quoi il retourne. Elle vit et fait des films à Marseille. Si Passer l’Hiver est son premier long métrage, il prend sa place dans une filmographie déjà dense. Avant d’accéder au long, la réalisatrice a signé 6 courts métrages de fiction et 3 documentaires. Passer l’Hiver est le titre d’un recueil de nouvelles du romancier Olivier Adam. Pourquoi ce choix d’adapter ? « J’aime l’écriture d’Olivier Adam, je la trouve très cinématographique. J’avais commencé à écrire le film et j’étais partie sur le portrait d’une femme de cinquante ans. Dans la nouvelle que j’ai finalement choisie, Nouvel an (le film emprunte son titre au recueil, ndlr), les deux femmes ont trente ans. L’âge du personnage de Claire est donc une des choses que j’ai modifiées. Et puis l’histoire démarre dans une station-service. Chez moi c’est un peu une obsession, les stations-service. Il y a aussi cette situation de départ : une personne qui arrive et en déplace une autre. Tout ça me plaisait », raconte Aurélia Barbet.
Sept ans se sont écoulés entre le début de l’écriture et le film. « Ça a été long parce qu’il a fallu faire ses preuves. Je n’ai pas fait d’école. J’ai réalisé des courts mais toujours en autoproduction, et sans jamais avoir de prix, quelque chose qui serve ta cause quand tu rencontres un producteur. Pour  »Passer l’Hiver », j’ai déposé seule à l’avance sur recette et je me suis ramassée en plénière ». Deux ans plus tard, vient la sélection du scénario au Festival des scénaristes de Bourges. « Le producteur Serge Duveau d’Abelina Films m’a contactée, je suis partie avec lui. On a réécrit pendant deux ans ». Entre temps, il y eut un deuxième passage infructueux à l’avance sur recette avant de l’obtenir enfin. Dans la tête de sa réalisatrice, le film a changé – « un peu » -, mais pas l’absolue nécessité de le faire.

A ce stade, Aurélia a des idées de comédiennes à qui confier le rôle principal. Dans les faits, cela s’avérera difficile. Un refus de Dominique Blanc et il faut chercher encore. « Je cherchais une femme qui avait été très belle, une actrice des années 80 dont l’image s’était peu à peu estompée ». C’est finalement Gabrielle Lazure qui devient Claire, l’héroïne. L’autre rôle féminin, ce sera Lolita Chammah : « je voulais quelqu’un avec cette énergie-là et quelque chose d’enfantin ».

Pour la réalisatrice, diriger des comédiennes – qui plus est confirmées comme le sont ces premiers rôles – est une première et aussi, rétrospectivement, le plus difficile. Pas le temps de se connaître ni d’apprendre à travailler ensemble. Pas de certitude que les personnages vont finalement pouvoir s’incarner. « J’avais plutôt travaillé avec des comédiens de théâtre, j’ai manqué d’expérience avec les acteurs ».
Côté paysage, c’est l’océan, plutôt que la mer qu’Aurélia imagine en fond de son histoire. La Région Pays de la Loire, première à s’engager sur le projet, fournira le décor d’une partie du film. Vient ensuite le soutien de la Bretagne. Le travail s’engage alors rapidement avec la mission régionale d’Accueil des tournages et l’équipe se constitue. « On a équilibré les embauches entre les deux régions. Le chef déco, tous les gens de la déco et la deuxième assistante réal sont bretons ». Au plus près, la première assistante et le directeur de production sont des amis, Marseillais avec qui Aurélia a l’habitude de travailler.

Le tournage durera 5 semaines et c’est finalement, dans les Côtes d’Armor, la grande plage de Saint-Cast et l’hôtel qui la surplombe qui serviront – dans leur langueur hivernale – de décor maritime. Le montage succède immédiatement au tournage. Il faut faire des choix rapides. « Auparavant, dans mon travail, je ne m’étais jamais trouvée avec une équipe. Je faisais presque tout seule. Là, on est sollicité tout le temps, il faut décider de tout, sans délai et même si on n’est finalement pas le plus avisé pour le faire. Parfois, j’aurais eu besoin de me recentrer sur mon projet. En documentaire, c’est moi qui cadre. Sur ce film, j’ai choisi le chef opérateur parce que j’aime son travail. N’empêche qu’il y a une part de ton film qui t’échappe ». Passée cette expérience dont elle dit tirer quelques leçons pour la suite, Aurélia Barbet achève actuellement un documentaire tout en écrivant son prochain long métrage. Gonflée à bloc !

Charlotte Avignon

Photo en Une : la réalisatrice Aurélia Barbet
 »Passer l’hiver » sortira en salles le 15 janvier 2014, distribué par Shellac.