ESTRAN 7 : nouvelle formule, nouvelle coordinatrice !

Porté durant cinq éditions par l’association Côte Ouest sous la forme d’un concours de scénarios, le dispositif ESTRAN – devenu parcours de création accompagnée – connaît cette année sa deuxième mouture sous la direction de Films en Bretagne, qui sans changer de philosophie, a adapté sa formule de manière empirique. Une constante : favoriser l’émergence d’auteurs de fiction sur le territoire en facilitant la production d’une première ou deuxième oeuvre. Des nouveautés : ouvrir la sélection à des profils atypiques, et impliquer davantage de jeunes producteurs bretons dans l’accompagnement des projets. Camille Ferrero, coordinatrice d’ESTRAN 7, s’attèle à mettre en place cette nouvelle édition.

En poste depuis le premier juin dans les bureaux de Films en Bretagne, Camille Ferrero reprend les rênes d’un vaste et long dispositif d’accompagnement d’auteurs, qui sollicite sur une période de 18 mois, de nombreux acteurs et partenaires en Bretagne, mais aussi au-delà. En provenance de Paris, où elle coordonnait entre autres le festival Paris Courts Devant, Camille sait qu’elle devra rapidement tisser son maillage local. Une démarche qui est pratiquement inscrite dans son ADN professionnel : « J’ai débuté ma carrière comme administratrice de production pour la société MPM Film, avant d’intégrer l’équipe du festival de Paris Courts Devant, où je travaillais à la programmation de l’évènement, à la recherche d’intervenants professionnels, ainsi qu’à la gestion des partenariats et des embauches. Parallèlement, j’étais missionnée par l’Institut Français, qui tous les ans, pendant le festival de Cannes, soutient une dizaine de duos producteur/auteur en provenance de pays dits « émergents », tous porteurs d’un projet de premier ou second long métrage. Il s’agit pour moi, puisque je continue cette activité, de permettre à ces duos d’identifier les dispositifs d’aide auxquels ils peuvent prétendre, de rencontrer d’éventuels co-producteurs, des responsables de festival, de faire du lien. Cette rencontre, intitulée « La Fabrique Cinéma », fonctionne comme ESTRAN sur un appel à projets ». Les qualités d’organisation et de planification requises pour gérer ce type d’évènement, détourneraient presque de ce qui fait le sel du travail de Camille. Il suffisait pourtant de lui poser la question : « Je prends plaisir à faire se rencontrer des professionnels autour d’un projet, à présenter aux auteurs et producteurs les personnes qui me semblent les plus à même de donner de l’élan à leur film, pour l’aider à éclore. J’aime aussi participer à ma manière à l’ensemble du processus de création des films ». Un plaisir que Camille aspire à retrouver au sein d’ESTRAN 7 nouvelle formule.

ESTRAN 7 : des fondamentaux et quelques nouveautés

Ils seront comme pour la précédente édition quatre auteurs-réalisateurs à être sélectionnés à partir d’un appel à projets de courts-métrages de fiction. Lancé et présenté samedi 9 juin à 19h, au festival du Film de l’Ouest, à Betton, ESTRAN 7 sera ouvert aux postulants jusqu’au 30 août. Une fois l’appel à projets clos, une pré-sélection des films sera assurée par un jury de professionnels. C’est ensuite le collectif formé par les huit producteurs impliqués dans le dispositif (dont seront issus les quatre producteurs ESTRAN 7), ainsi que des partenaires, qui retiendront quatre projets parmi les films pré-sélectionnés. L’annonce officielle des auteurs qui participeront à l’aventure se fera à l’occasion du festival du Film Court de Brest, début novembre.

Comme leurs homologues d’ESTRAN 6, les nouveaux promus seront accompagnés durant tout le processus de création de leurs films, à travers des ateliers, une période de formation professionnelle, et de nombreuses rencontres. « Nous prévoyons une vingtaine de jours d’accompagnement, pensés et planifiés suivant les étapes de fabrication des films. L’écriture, la réalisation, la direction d’acteurs, la production et la post production, seront autant de thèmes et de pratiques parcourus par les intervenants » explique Camille Ferrero, qui compte évidemment s’appuyer sur les compétences déjà identifiées par l’équipe de Films en Bretagne pour animer ces séances, mais qui aura aussi  à charge d’enrichir le vivier, notamment par des professionnels venant d’autres régions. « J’ai eu l’occasion de travailler avec des professionnels de grande qualité hors de Bretagne, et les associer aux forces vives du territoire est une perspective enthousiasmante pour moi » commente-t-elle, avant de désigner comme un défi tout aussi stimulant le fait de devoir identifier rapidement les besoins des auteurs et des producteurs, qui auront à négocier avec différentes contraintes. « les courts-métrages ne doivent pas dépasser dix minutes, les personnages principaux sont limités à quatre, tout comme les lieux de tournage. Quant à la diffusion, elle est déjà inscrite au calendrier, début 2020. Le festival Travelling à Rennes, les chaînes locales TVR, TébéO et TébéSud, ainsi que France 3 Bretagne, permettront de faire exister les films à l’écran ». Un enjeu de taille pour les auteurs et leurs producteurs associés, tous jeunes dans le métier. « Rappelons aussi que ce dispositif, à ce jour unique en France, assure aux lauréats d’aller jusqu’à la réalisation de leur film, grâce à l’engagement fort de ses partenaires, notamment la Région Bretagne et les diffuseurs précités, qui soutiennent en numéraire et en industrie. Fait trop rare dans le cinéma, ESTRAN permet à quatre réalisateurs et quatre producteurs d’apprendre en faisant, et cela dans des conditions professionnelles. » conclut Camille.

Au-delà des soutiens acquis, il est attendu des producteurs une recherche efficace de financement supplémentaire sur un temps relativement court. Et c’est là une des premières distinctions entre ESTRAN 6 et ESTRAN 7. Jusque-là portée par Films en Bretagne, la production des courts-métrages sera cette fois entièrement déléguée à une nouvelle génération de producteurs bretons, soit récemment en poste dans des sociétés existantes, soit à la tête de sociétés nouvelles. Bien qu’ils soient huit à s’être portés candidats pour produire un film issu d’ESTRAN 7, seulement quatre d’entre eux seront associés aux auteurs lauréats, en fonction de leur désir de travailler ensemble, mais aussi selon d’autres critères, éditoriaux par exemple.

Camille Ferrero participera à la constitution de ces duos, une responsabilité d’autant plus délicate et riche, qu’une autre nouveauté d’ESTRAN 7, est d’ouvrir l’appel à projets à des auteurs qui n’ont pas suivi de formation cinématographique classique. Laisser la place aux écritures nouvelles, aux gens du faire, à celles et ceux qui ne maitrisent pas forcément les codes scénaristiques du métier, est une manière de ne pas se couper des talents qui émergent hors des sentiers balisés. La bonne association auteur/producteur, qui ne reposera donc pas forcément sur un langage commun, paraît d’autant plus importante.

Dans cette même idée, la primauté donnée à l’écriture du scénario sera largement nuancée pour cette nouvelle édition d’ESTRAN. Il s’agit avant tout d’aiguiser le talent de jeunes réalisateurs, de les former à la préparation des tournages, à la mise en scène et à la direction d’acteurs, plutôt que de chercher à en faire des scénaristes, un autre métier très spécifique.

Enfin, Camille Ferrero insiste sur le caractère collectif et ouvert du dispositif. « Les lauréats ne fonctionneront pas en huis clos. Les formations et ateliers qu’ils suivront seront également ouverts à d’autres auteurs, pour constituer des groupes d’environ dix personnes. Les structures d’accueil seront également plurielles et réparties sur le territoire ». Si beaucoup reste à faire pour la dernière arrivée de Films en Bretagne, elle ne manque en tout cas pas d’entrain à l’idée de coordonner, et pourquoi pas d’incarner, la nouvelle formule d’ESTRAN, inscrite sous le signe de l’ouverture.

Yves Mimaut