Delphine Jouan : des décors d’Occitanie à ceux de Bretagne


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Delphine Jouan

Arrivée à Rennes en septembre dernier, Delphine Jouan a pris la relève de Catherine Delalande comme coordinatrice générale d’Accueil des tournages en Bretagne. Nous avons souhaité la rencontrer pour parler de son parcours et de ses futurs projets pour le paysage audiovisuel breton.

Films en Bretagne : Comment se sont passés vos premiers mois au sein du bureau d’accueil des tournages ?

Très bien, ça a été intense mais j’ai eu un très bon accueil des institutions et de tous les professionnels que j’ai pu rencontrer jusqu’à maintenant.

Quel est votre parcours avant d’arriver comme coordinatrice ?

Après une licence en histoire de l’art, je suis allée à l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles (ENSP), puis j’ai toujours travaillé grâce à la photographie en tant que salariée et au sein de ma propre entreprise comme photographe et iconographe. En 2007, je suis entrée à la Commission du Film du Languedoc-Roussillon par l’intermédiaire de la photographie. La commission du film venait d’être créée et recherchait une personne pour développer la base de données de décors. La commission a été créée en 2006, il y avait encore tout à faire. Je suis restée dix ans au sein de cette structure comme chargée d’accueil des tournages.

L’audiovisuel en Bretagne a atteint une certaine maturité, et le long-métrage se développe de plus en plus notamment par la coproduction. Avez-vous pour objectif de rechercher des partenaires à l’international ?

Dans le cadre de la politique mise en œuvre par la Région, accompagner cet élan vers la coproduction et la prospection de projets à l’international va faire partie des missions d’Accueil des tournages en Bretagne.

Je me suis notamment rendue à Londres lors du salon Focus London (salon international des lieux de tournages) avec la délégation française coordonnée par Film France. C’est un moment privilégié pour rencontrer des professionnels anglais, essentiellement des producteurs. Cela a été l’occasion de promouvoir la Bretagne au sens large (décors et compétences locales), d’avoir des rendez-vous avec des sociétés de production, des repéreurs…

A la prochaine Berlinale, Accueil des tournages en Bretagne sera présent pour promouvoir la Région lors de différentes rencontres entre producteurs internationaux organisées par Film France, l’Académie franco-allemande du cinéma et la Région Grand Est. Plusieurs professionnels bretons seront également présents. C’est une belle année pour la Bretagne à Berlin avec le long-métrage Trois jours à Quiberon d’Emily Atef en compétition officielle, coproduit par Tita Productions et soutenu par la Région Bretagne, avec le documentaire Je vois rouge  de Bojina Panayotova en sélection Panorama, produit par Stank et soutenu par la Région Bretagne, avec Flee de Jonas Poher Rasmussen, au Talent Project Market, film d’initiative danoise coproduit entre autre par Vivement Lundi !.

Il sera intéressant d’être présent également au festival Séries Mania, festival international de la série,  qui a lieu cette année à Lille avec une nouvelle « formule ».

Quelles sont les demandes récurrentes des sociétés de production ?

Les premières demandes concernent la plupart du temps les décors ; les professionnels nous contactent pour avoir des propositions de lieux les plus pertinentes par rapport à leurs scénarios ou leurs projets. Notre base de données de décors joue un rôle déterminant pour être force de propositions et pour « rassurer » les productions sur le fait qu’ils pourront implanter leur histoire en Bretagne.

L’autre demande récurrente concerne les recherches de professionnels installés sur le territoire. Notre base de données de techniciens et de comédiens locaux est un outil précieux pour pouvoir proposer des professionnels compétents aux porteurs de projets.

On nous contacte également régulièrement pour avoir des informations sur le FACCA (Fonds d’Aide à la Création Cinématographique et Audiovisuelle).

Pensez-vous qu’il faudrait inciter plus fortement l’embauche de chefs de postes ?

Oui évidemment, notre travail est d’inciter les productions à embaucher localement les chefs de poste mais également le reste des équipes. Les chefs de poste recrutés en région sont en général la garantie d’un taux d’emploi fort sur le territoire, puisqu’ils connaissent bien les différents techniciens régionaux. Pour les comédiens, cela se vérifie également quand le directeur ou la directrice de casting est en région ; leurs bonnes connaissances de notre fichier de comédien.ne.s et des professionnels installés en Bretagne est un vrai avantage pour pouvoir proposer des artistes locaux aux productions.

Envisagez-vous de revoir la question de la multi-régionalité pour l’inscription dans la base TAF (Techniciens, Artistes et Figurants) ?

Je ne prévois pas de modifier ce point, parce que cela a un vrai sens que nous proposions un fichier de professionnels vivants sur le territoire. Quand un film est soutenu financièrement par la Région Bretagne, la production doit réaliser un taux de dépenses localement et il est structurant pour le secteur du cinéma et de l’audiovisuel en région, que ces dépenses se fassent dans l’emploi régional.

Lors des festivals, vous organisez régulièrement des rendez-vous pour rencontrer les techniciens et comédiens. Ne faudrait-il pas encourager autrement la prise de contact avec eux ?

Dans la mesure du possible, j’aimerais pouvoir rencontrer un maximum de professionnels.

Les festivals en Région sont l’occasion de nombreuses rencontres. Mais des rendez-vous individuels restent des moments privilégiés pour pouvoir  expliquer aux nouveaux arrivants le fonctionnement d’Accueil des tournages en Bretagne, connaître leur parcours, exposer le paysage audiovisuel et cinématographique en Bretagne, faire connaissance, les conseiller.

Aller régulièrement sur les tournages permet également de rencontrer les professionnels dans le cadre de leur travail.

Quels sont les autres chantiers que vous souhaiteriez mettre en place ?

J’aimerais que l’on reprenne les Eductours (terme emprunté au secteur touristique). Nous avons la chance d’être proches de Paris en temps, nous pourrons en profiter pour faire venir sur une ou deux journées, des scénaristes, producteurs, chefs de poste, pour leur faire découvrir le potentiel des décors et des ressources de la Région Bretagne.
Profiter également de l’avantage de cette proximité avec Paris, pour aller plusieurs fois dans l’année à la rencontre des sociétés de production dans leurs lieux, afin de tisser des liens et ancrer le plus tôt possible les projets de films en Bretagne.

Dans le même esprit que les Eductours, j’aimerais mettre en place des Repertours pour les techniciens de la région, pour leur faire connaitre ou redécouvrir des décors et les mettre en relation avec les responsables des lieux.

Par ailleurs, il sera nécessaire de bien suivre le chantier sur l’évolution de la base de données des professionnels (base TAF) engagé par Film France et l’ensemble du réseau des commissions du film, pour veiller à ce que notre fichier des professionnels reste pertinent.

J’envisage de nombreux autres chantiers sur les décors, pour les professionnels, sur la communication, pour rendre le territoire toujours plus attractif pour l’ensemble du secteur du cinéma et l’audiovisuel. 

Propos recueillis par Yann Pichot