« Ce film ne doit pas être qu’un objet d’animation culturelle ! »


« Chute et renaissance d’un funambule, humble et courageux ». C’est l’histoire d’Antoine Rigot racontée par Guillaume Kozakiewiez dans le film « Salto Mortale ». À l’occasion de l’avant-première de ce long métrage documentaire, dimanche 23 novembre au Ciné TNB de Rennes, Jean-François Le Corre, producteur à Vivement Lundi !, et Michel David, distributeur chez Zeugma Films, sont lancés dans le marathon de la diffusion.

– En tant que producteur, comment décide t-on qu’une histoire devienne un film de 52 minutes pour la télévision ou de 90 minutes pour le cinéma ? 

Jean-François Le Corre : Guillaume Kozakiewiez et Grégory Nieuviarts ont commencé à tourner. Ils m’ont montré un montage grossier des premiers rushes qui comportait une séquence où Antoine Rigot cherchait son équilibre, marchant sur un sol rocailleux en Ardèche. Cette séquence de marche devait pouvoir durer dans le montage, ce qui m’a semblé difficile dans un documentaire pour la télévision. Là, je me suis dit que pour que Guillaume puisse filmer le corps d’Antoine Rigot au travail et avoir une réelle plénitude, il fallait quelque chose qui puisse vivre dans un format différent de celui du 52 minutes pour la télévision et si possible sur un grand écran. Je produis des films que j’adore avec la télévision, dans le champ du documentaire historique en particulier, mais je suis quelqu’un qui n’a pas de naïveté par rapport à la manière dont on travaille avec ce média. Je n’ai jamais pensé que l’on devait faire du cinéma pour la télévision. Le rapport du média au public – et réciproquement – n’est pas le même. Je suis téléphage et cinéphile. J’avais le sentiment que ce film aurait du mal à trouver sa place en tant qu’œuvre audiovisuelle. Nous avons donc décidé de tenter l’aventure du long métrage. Guillaume et Grégory sont repartis sur une période d’écriture avec Anne Paschetta qui avait, elle, cette expérience du grand format. Et puis, je n’avais jamais produit de film pour le grand écran et j’en avais très envie ! J’avais notamment le désir d’aborder l’exploitation cinématographique qui est très différente de celle de la télévision.

– À quel moment un distributeur choisit-il de s’embarquer dans l’aventure ?

 Michel David :  Avec Jean-François, on se connaît depuis longtemps. On fait partie du même réseau de producteurs que l’on a créé ensemble dans une société commune : Galactica. J’ai assisté à une projection à Paris, alors que le film n’était pas terminé. Ça m’a semblé évident que le travail de Guillaume devait être reconnu par une distribution en salle. Je pense que distribuer un film, c’est impérativement avoir un coup de cœur cinématographique, un coup de cœur partagé avec ma collaboratrice Marie-Sophie Decout à Zeugma Films.

– Sortir un film documentaire aujourd’hui, ça doit être un peu comme marcher sur un fil…

Michel David :  Le documentaire a tellement de formes diverses qu’il a du mal à être appréhendé par le public. Il n’a pas le même rythme de diffusion qu’un film de fiction. Pour un film documentaire comme Salto Mortale, il faut faire un travail spécifique en apportant un plus. Ce plus étant à la fois une écriture de cinéma et un centre d’intérêt pour un public potentiel auquel on réfléchit. C’est un film de cinéma, un film sur le corps, le corps abîmé, le corps restauré, mais c’est aussi le corps d’Antoine Rigot. Il y  a beaucoup de débats qui vont se faire en commun avec Guillaume et Antoine, chacun parlant de leur point de vue et nous avons ouvert plus largement les débats à tous les réseaux associatifs, évidement du cirque, et du spectacle vivant. En s’appuyant sur ces débats, on espère avoir à la fois des échanges intéressants et faire venir les gens dans la salle. Mais il y aura aussi des séances sèches sans interventions.

JFLC :  C’est là qu’il y a une bataille à gagner ! Réussir à faire en sorte que ces films existent dans des salles comme des vrais films et non pas comme des objets d’animation culturelle. On sent bien que certaines salles prennent le film à partir du moment où il y a un débat après. Moi quand je vais voir un film au cinéma, il n’y a pas toujours un réalisateur qui est là pour parler de son travail, il n’y a pas toujours un débat et très clairement parfois je n’en ai rien à faire. On le savait que c’était une règle qu’il fallait accepter. Mais cela montre bien que le documentaire – même s’il revient en force dans les salles en ce moment – a encore besoin de pousser les portes pour exister pleinement en tant qu’œuvre cinématographique lors des projections et pas comme objet d’animation culturelle ou objet de débat. Ce n’est pas si simple.

– Comment les exploitants réagissent-ils ? 

Michel David : À Paris, l’exploitante du Saint-André des Arts a adoré le film. Elle programme Salto Mortale pendant trois semaines à raison de plusieurs séances par jour. C’est important aussi qu’il y ait une salle qui tienne un film trois semaines, les entrées peuvent être beaucoup plus importantes en troisième ou quatrième semaine grâce au bouche-à-oreille. C’est une exploitante convaincue, et qui va se battre avec nous pour tenir le film. Nous avons donc décidé de travailler avec elle en exclusivité plutôt que de disperser le film dans des salles qui ne le défendraient pas. Et on s’appuie sur deux grandes zones de diffusion qui sont la Bretagne et la région Rhône-Alpes puisque le film a obtenu une aide de la région Rhône-Alpes aussi. Donc on a actuellement plus d’une soixantaine de salles très inégalement réparties sur  le territoire et on continue à faire notre boulot.

Propos recueillis par Jennifer Aujame

Photo de Une : droits réservés

Avant-premières en présence d’Antoine Rigot et de Guillaume Kozakiewiez 

RENNES le 23 novembre à 18h au Ciné TNB
LYON le 24 novembre à 20h au cinéma Comoedia
PARIS le 25 novembre à 20h30 au cinéma le Saint-André des Arts

Sortie nationale le 26 novembre 2014

– Jeudi 27 novembre à Plélan-le-Grand au cinéma l’Hermine à 20h30

– Dimanche 30 novembre à Quimper au cinéma Quai Dupleix à 17h00

– Lundi 1er décembre à Callac au cinéma l’Argoat à 20h30

– Mardi 02 décembre à Loudéac au cinéma Quai des images à 20h30

– Mercredi 03 décembre à Gourin au cinéma Jeanne d’Arc à 20h00

– Jeudi 04 décembre à Lannion au cinéma Les Baladins à 20h30

– Vendredi 05 décembre à Guingamp au cinéma Les Baladins à 20h30

– Samedi 06 décembre à l’Ile Tudy au cinéma du Port à 19h30

– Mardi 09 décembre à Concarneau au cinéma Cinéville à 20h30

– Mercredi 10 décembre à Plougastel au cinéma l’Image à 20h30

– Jeudi 11 décembre à Saint-Brieuc au cinéma Club 6 à 20h15

Ces projections seront accompagnées par Guillaume Kozakiewiez et, pour certaines d’ente-elles, par Antoine Rigot.

Lien(s) en relation avec ce sujet :

Le site de Zeugma Films

Le Facebook de Salto Mortale

Le site de Vivement Lundi !

Portrait de Guillaume Kozakiewiez