[LE DRESSING] 3 Éco-Questions à Caroline Jégou, costumière


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Caroline Jégou est costumière. Après des études de gestion de la production audiovisuelle à Rennes, elle est partie vivre à Paris. C’est sa rencontre avec une cheffe costumière lors d’un stage qui l’a convaincue de faire ce métier… De retour à Rennes depuis 2017, cela fait dix-huit ans maintenant qu’elle travaille en tant que costumière et habilleuse dans le cinéma et notamment pour les films Demain tout commence, Rien à perdre ou des séries comme Les Revenants, Brocéliande

Pour elle, la préservation de l’environnement a toujours été une priorité et une évidence. Militante dans l’âme, elle estime qu’il faut agir au quotidien, même dans son travail. L’éco-production, c’est du bon sens. Elle veut jouer ce rôle aujourd’hui au sein de cette industrie et c’est pourquoi elle crée Le Dressing.


3 ÉCO-QUESTIONS À CAROLINE JÉGOU

Films en Bretagne :

Comment êtes-vous arrivée à vous intéresser à l’éco-production ? Pourquoi, comment est venue l’idée du « Dressing » ?

Caroline Jégou :

Depuis que je suis très jeune, je milite pour l’écologie. Au fur et à mesure de mes expériences dans le cinéma, je me suis rendu compte qu’il y avait un vrai manque à ce niveau. Ça m’a posé un problème de conscience, ça n’allait plus avec mes valeurs. Puis l’éco-production est arrivée et ça m’a permis de me dire que petit à petit on pouvait faire changer les choses et surtout nos habitudes sur les tournages. J’ai eu envie de m’investir mais à mon poste, aux « costumes » ; il y a énormément de gâchis dans cette branche et l’industrie du textile est très polluante.

En Bretagne, il n’y a pas de loueurs de costumes cinéma. Alors quand il faut faire les derniers préparatifs d’un film ici, notre seul choix est d’acheter du neuf car on ne peut pas se faire rembourser les achats en fripes si cela ne convient pas. C’est un risque surtout pour les films à petit budget. Puis, quand les tournages sont terminés, les productions vendent ou donnent les vêtements car ils n’ont pas d’espace pour les stocker. C’est là que je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire pour éviter de toujours racheter les mêmes choses à chaque tournage ou de dépendre des loueurs de Paris. J’ai donc décidé de créer Le Dressing qui est un lieu de location de costumes pour le cinéma afin d’éviter le gaspillage. Le principe est simple : je récupère les vêtements et accessoires des films tournés en Bretagne, que les productions ne veulent pas garder, afin de les réutiliser pour d’autres tournages. Cela évite le réachat en permanence et permet d’avoir un système d’économie circulaire, et surtout local.

Le Dressing est aussi un lieu d’accueil pour que les chef·fes costumier·ère·s puissent faire leur préparation dans un lieu adapté à leurs besoins : essayages avec des comédien·nes, couture, lavages en machines, mise à disposition de matériel professionnel (machine à coudre, à flocage, brodeuse…) et d’un espace dédié à la patine.

Je récupère tout ce qui est en lien avec la couture, comme le tissu, la mercerie, les machines à coudre, les machines à laver, les sèche-linges car c’est aussi un lieu de création.


Films en Bretagne :

Comment se monte ce projet ? Qu’est-ce qui vous paraît plus facile à mettre en place ? Ou au contraire quels sont les freins, les contraintes ?

Caroline Jégou :

À la fin d’une série tournée à Vitré, la production n’a pas voulu récupérer les vêtements, c’était pour moi l’occasion de commencer mon premier stock de vêtements.

Le Dressing est soutenu et aidé par l’association Actions Ouest dont une des missions est de fournir un service d’aide aux sociétés de production cinématographiques et audiovisuelles en Bretagne.

Le plus dur a été de trouver un endroit pour stocker tous les vêtements en attendant de trouver un lieu. J’ai dû squatter la mezzanine de mon copain. Il est très difficile de trouver un local à Rennes. Il fallait un lieu assez grand, sain et pas trop cher pour stocker tous les vêtements actuels et futurs.

Le Grand Huit est un lieu artistique qui propose un voyage festif et familial dans l’univers de la fête populaire et des arts forains traditionnels. Ses propriétaires ont vraiment été emballés par le projet Le Dressing et ils m’ont proposé un espace que je devrais intégrer fin 2025, une fois les travaux de leurs hangars terminés. L’avantage de ce lieu, qui se trouve sur l’ancien site des ateliers SNCF, est sa proximité avec la gare de Rennes ce qui permet d’accueillir rapidement les personnes qui viennent de Paris ou d’ailleurs.


Films en Bretagne :

Qu’est-ce qui vous manque pour avancer plus rapidement dans ce projet ?

Caroline Jégou :

Ce qui me manque, ce sont des financements pour pouvoir aménager ce futur espace afin d’accueillir au mieux les professionnels.

Il n’existe aucun lieu comme Le Dressing, c’est une opportunité importante pour le développement du cinéma en Bretagne.

J’ai tellement hâte que ce lieu ouvre pour vous raconter la suite de ce beau projet.

J’ai encore plein d’autres idées d’éco-production mais vous en saurez plus au prochain épisode !

Propos recueillis par Mado Le Fur pour Films en Bretagne, avril 2025.