C’est au FIPA de Biarritz que Centre Images a dévoilé les chiffres 2009 de sa traditionnelle évaluation des soutiens territoriaux. Pour la première fois depuis 1986, les crédits attribués par les collectivités territoriales au cinéma et à l’audiovisuel sont en baisse.
Depuis 18 ans, Centre Images (autrefois APCVL), observe en détail les politiques territoriales et propose un bilan annuel des aides attribuées en régions, tous genres confondus. Un travail précieux qui a permis de suivre depuis 1992, année de publication du premier Guide des aides territoriales, l’évolution du rôle des collectivités dans le financement des œuvres audiovisuelles et cinématographiques. Et pour fêter sa majorité, l’édition 2010 du Guide nous propose un bilan 2009 dont émergent quelques tendances qui pourraient s’affirmer dans les prochaines années.

Premiers chiffres : en 2009, 1556 aides ont été attribuées par 24 régions, 15 départements, une ville et une communauté urbaine ayant un fonds de soutien. 15% des projets sont soutenus par plusieurs collectivités et 202 œuvres ont ainsi pu bénéficier d’un cumul de deux à quatre subventions. Il faut ici distinguer les soutiens en infra-régionalité (soutien de deux collectivités d’une même région administrative, par exemple la Région Bretagne et le Conseil général des Côtes d’Artmor) qui concernent 139 productions et les soutiens en inter-régionalité (soutien de deux collectivités de régions administratives différentes) qui n’ont financé que 63 projets. Les financements inter-régionaux se pratiquent le plus souvent dans le cadre du soutien au court métrage et au long métrage cinéma.

Le budget prévisionnel cumulé 2009 pour l’ensemble des collectivités s’élevait à 56,9 M €. Ce sont, finalement, 54,3 M€ de crédits qui auront été accordé sur l’exercice, à comparer avec les 55 M€ de crédits votés en 2008. On constate donc une légère baisse des crédits attribués en régions. Si ce recul ne peut encore être qualifié d’inquiétant, il soulève déjà quelques questions. Assistons-nous à un gel de la croissance des politiques audiovisuelles territoriales consécutif aux craintes qui pèsent sur les budgets des collectivités, et notamment sur ceux des départements ? L’effet levier créé par le dispositif 1€ pour 2€ mis en place par le CNC, et qui a « dopé » de nombreux fonds régionaux depuis 2004, aurait-il atteint ses limites ? Le développement de la production en régions connaîtrait-il une phase de stagnation après quinze années de croissance régulière ?

Le soutien à l’audiovisuel et les aides au développement en hausse

L’examen plus précis des chiffres permet de détailler quelques tendances lourdes. Si le soutien au cinéma capte 60 % des crédits, il est en baisse alors que l’audiovisuel voit sa part augmenter dans les crédits attribués. L’émergence des télévisions locales semble être l’une des raisons de l’augmentation de la part du soutien aux programmes audiovisuels et cela serait particulièrement sensible dans les régions dans lesquelles ces diffuseurs se sont développés. L’augmentation de la part des aides accordées à des documentaires (9,3 M€, en hausse de 2%) serait particulièrement liée à ce nouveau paysage de la TNT locale. Si Centre Images dénombre 674 aides accordées à des projets documentaires en 2009, le secteur n’a pas encore retrouvé le niveau de 2007 avec ses 695 aides votées.
Mais c’est surtout du côté de la fiction que le soutien des collectivités à l’audiovisuel connaît une forte croissance : plus 33% entre 2008 et 2009 pour un investissement global de 10 M€ ! Pour Colette Quesson de Centre Images « la fiction télévisée s’avère plus forte pourvoyeuse d’emploi local que le cinéma et cet impact sur les économies des territoires pourrait être l’une des explication de cette tendance ».

Autre constat évident à la lecture des chiffres collectés par Centre Images, les aides à l’écriture et au développement se sont généralisées dans la majorité des fonds d’aide.

Enfin, cette première analyse de ces chiffres ne serait pas complète si nous ne regardions pas de plus près quels sont les principaux territoires bénéficiaires de ces politiques territoriales. Le trio de tête ne changera pas et reste le même que ces dernières années : l’Ile-de France, Rhône Alpes et le Nord Pas de Calais sont les régions où les fonds sont les plus importants. Mais, paradoxalement, ce sont toujours les producteurs d’Ile-de-France qui captent la plus grosse masse des fonds régionaux, pourtant nés dans le prolongement des lois de décentralisation. Quatre chiffres sont particulièrement révélateurs : 72% des aides attribuées au documentaire le sont via des sociétés implantées hors d’Ile-de-France tandis que 94% des aides attribuées à la fiction TV, 96% des aides attribuées au long métrage cinéma et 69% des aides attribuées au court métrage le sont via des sociétés établies en Ile-de-France. Invariablement depuis 18 ans, la production de fiction en France reste une affaire qui dépasse difficilement le périphérique parisien…
Le guide édité par Centre Images et la totalité des éléments statistiques survolés dans ce billet seront disponibles gratuitement à partir de lundi 1er février sur le site www.centreimages.fr.

Jean-François Le Corre