Série "Douce" : 1,4 million de vues !


En ligne sur les réseaux sociaux depuis mai 2025, la mini-série d’animation Douce, réalisée par Isabelle Lenoble, cartonne avec 1,4 million de vues (et cumule même plus de 2 millions de vues avec les bonus !).

Conçue dans un format vertical pour un visionnement sur mobile (une première en Bretagne !), Douce est destinée à une audience adulte. Cette comédie s’inspire des moments de la maternité sous un angle caustique. On y suit le personnage de Douce – égoïste, spontanée et immature – qui n’a qu’un but : être une mère parfaite et une bonne meuf !

Disponible sur Instagram, TikTok et Youtube, la mini-série a été produite à Rennes par Vivement Lundi ! et fabriquée dans les studio Personne n’est parfait (ainsi qu’à Bordeaux avec Sun Creature). La mini-série a notamment bénéficié de la singularité de l’écosystème breton et, en particulier, d’un engagement de la chaîne locale TVR abondé par le dispositif Tempo financé par Rennes Métropole.

À l’occasion du succès de la série, nous avons posé 3 questions : la première à la réalisatrice Isabelle Lenoble, le seconde au producteur Mathieu Courtois et la troisième à la directrice de TVR, Aurélie Rousseau.


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Isabelle Lenoble (réalisatrice), Estelle Meyer (voix de Douce), Mathieu Courtois (producteur) et Kévin Feildel (monteur son)

1 QUESTION À ISABELLE LENOBLE, RÉALISATRICE

Isabelle Lenoble, réalisatrice

Après des études en Arts déco à Strasbourg et une formation en animation aux Gobelins, Isabelle travaille pour des studios français sur des séries d’animation avant de s’installer à Rennes en 2001. Elle commence à travailler avec la société Vivement Lundi ! en tant que storyboarder, scénariste ou décoratrice sur des séries comme La Tête dans le guidon ou Bienvenue à Bric-à-broc. Elle (co)réalise ensuite plusieurs séries comme Pok&Mok et La Science des soucis. Elle travaille actuellement à l’écriture de son premier long métrage.

Films en Bretagne :

Quelle est l’origine de Douce et qui est-elle ? Comment envisage-t-on la création d’une série pensée pour les réseaux sociaux ? Qu’apportent-ils à ta démarche artistique ?

Isabelle Lenoble :

Douce est un exutoire. Ce petit croquis en noir et blanc est né sur un coin de table, à une époque où ma maternité rimait avec solitude. J’étais jeune, déracinée, et en total décalage avec la génération de mon milieu social. J’aimais mon ventre, je m’épanouissais avec mes enfants, je découvrais la frustration et la fatigue, et je ne me reconnaissais pas dans ce qu’il fallait être, ou faire. Nous étions vers 2008 (on envoyait son travail gravé sur CD par la poste… si si), j’étais en plein développement de ma première série d’animation Pok&Mok avec Vivement Lundi ! et Gaumont et Douce est vite devenue une petite BD défouloir sous forme de strip. Je caricaturais les enfants et la grossesse avec un ton plutôt « mignon ». Mon karma étant ce qu’il est, j’ai préféré réaliser Pok&Mok. Et puis 10 ans plus tard, je m’y suis remise avec l’envie de pousser le curseur, d’être plus en phase avec ma situation et mon regard sur la maternité.

La maternité étant quelque chose d’intouchable, encore à notre époque, j’ai eu envie de faire de Douce un personnage « bête comme on les aime ». Je voulais une version femme de Homer Simpson. Combien de « mamans nulles » ont été représentées en animation depuis 1989, date de création des Simpson ? (plus de 35 ans pour ceux qu’ont la flemme de calculer). J’ai collé 4 enfants à Douce pour balayer le large spectre de la maternité. On n’est pas mère de la même manière pour un enfant en bas âge ou pour un ado, pour une première grossesse ou une quatrième. À chaque période son lot de surprises !

Quelqu’un m’a dit un jour : ce n’est pas très féministe qu’elle ait autant d’enfants par les temps qui courent ! J’aurai voulu lui balancer un nichon vergeturé par l’allaitement dans le nez, tout en scandant « Et mon cul ? c’est du poulet ? » mais la punch-line était désuète. Le poulet n’avait rien à voir avec la maternité, mon cul n’avait rien à voir avec un nichon, et je n’ai aucune répartie quand je suis agacée. Aujourd’hui je peux répondre de manière extrêmement mature : c’est féministe d’en faire 6, c’est féministe de ne pas en vouloir, c’est féministe de se faire avorter, c’est féministe de les pondre. Je voulais que Douce soit un personnage polymorphe, qu’elle soit nous toutes, qu’elle puisse changer physiquement d’un plan à l’autre ou d’un épisode à l’autre. J’adore l’idée qu’elle soit moche, dodue, canon, gamine, dessinée avec les pieds ou très graphique. Il n’y a pas de modèle déni de mon personnage, on reconnait seulement ma patte graphique et son chignon, c’est tout.

Le premier mot qui me vient pour Douce n’est pas Femme, Mère, ou Quadragénaire, Non… C’est « Bête ». Avoir la bêtise, celle qui nous fait rire, est une grande qualité qui nous sauve du regard de la société. À une époque où toutes les séries pullulent de femmes et de petites « lles hyper intelligentes qui sauvent le monde, histoire de contrebalancer avec des décennies de potiches ou de faire-valoir, je suis heureuse de contribuer au droit à la bêtise des femmes, et encore plus des mères !

[concernant la création d’une série pour les réseaux sociaux et l’approche de la mise en scène] J’ai adoré ! Douce s’y prête, graphiquement et narrativement. J’ai eu très peur au début, mais l’exercice était plutôt sympa. Comme je suis diffcilement adaptable pour bosser sur des projets qui en mettent plein la vue, avec des perspectives réalistes, et des mouvements de caméra partout, pas parce que je suis “neuroatypique HPI “… Non, juste parce que je suis nulle en dessin, et bien j’ai adoré aller à l’essentiel. Ce format en portrait était parfait pour le type de mise en scène que je voulais faire. Pas trop de décors, des perspectives écrasées, des positions dans la pièce approximatives… Parfait pour moi.

La mise en scène verticale t’oblige à faire des entrées de champs par le haut ou le bas. J’ai composé mon image pour de l’illustration plus que pour du cinéma. J’ai pu mettre l’accent sur les posings, ces dessins
des personnages qui contribuent dans chaque plan à appuyer la situation. Et puis, j’adore l’idée qu’on consomme Douce, pardon, qu’on regarde mon art graphique en image animée, au creux de sa main, sur son
smartphone. Parce que Douce est un peu comme un bonbon pour moi. Il y a un côté petit truc acidulé qui reste 3 min en bouche et qui fait ta pause.


Propos issus du dossier de presse de la série.


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Isabelle Lenoble (réalisatrice) | Photo : Rennes Métropole

1 QUESTION À MATHIEU COURTOIS, PRODUCTEUR

Mathieu Courtois, producteur

Né en 1979 à Nantes, Mathieu Courtois a rejoint Vivement Lundi ! en tant que stagiaire production en 2003 avec une licence Cinéma à l’université de Rennes 2. Après avoir travaillé sur de nombreux courts métrages et séries comme Le Petit dragon, il produit en 2010 son premier court métrage : Cul de bouteille de Jean-Claude Rozec qui sera shortlisté aux Oscars. Durant 15 ans, il oscille entre production de séries (Dimitri), spéciaux TV, courts métrages (Mémorable) et longs métrages (FLEE), tous en animation. Depuis 2013, il dirige le studio Personne n’est parfait !, créé avec Jean-François Le Corre et Valérie Amour Malavieille.

Films en Bretagne :

Quels ont été les grands enjeux de fabrication – du développement à la diffusion, en passant par la fabrication – d’une série pensée pour les réseaux sociaux ? À l’heure actuelle, la diffusion cartonne… Ouvre-t-elle la voie à une suite ou de nouvelles perspectives ?

Mathieu Courtois :

À l’origine, Douce est une série d’animation 2D classique dans sa forme : 15 épisodes de 4′ en 16/9. Moins dans son fonds puisqu’elle vise les adultes. Quand, fin 2022, nous obtenons l’engagement de TVR via le dispositif Tempo, la question du format se pose. La chaîne adore le projet mais ne le voit pas sur ses antennes. Elle voudrait se servir de Douce pour élargir son audience sur les réseaux sociaux. L’expérience est alléchante, nous n’avons jamais travaillé pour une primo-diffusion sur les téléphones. La problématique du format devient prépondérante : on ne regarde pas une œuvre de la même manière sur un mobile que sur une télévision. L’ergonomie du téléphone doit être au centre des réflexions et un téléphone se tient verticalement à une main avec le pouce prêt à swiper vers le haut pour changer de vidéo. Il était pour moi inconcevable de proposer une œuvre en 16/9 qui aurait été, la plupart du temps, vue dans une taille minimale. Douce devait être produite dans le format 9/16 pour que le spectateur puisse profiter au mieux de la série. TVR a immédiatement accepté cette proposition. Après de légitimes inquiétudes, Isabelle a été conquise par les possibilités de mise en scène que lui offrait ce format en réalisant le storyboard du premier épisode.

Après l’objet téléphone, il fallait évidemment avoir en tête la personne derrière ce pouce prêt à swiper. L’attention n’est pas la même sur un téléphone. On doit réussir à « attraper » rapidement le spectateur sans qu’il ne rate aucune information qui nuirait à la compréhension de la narration. Nous avons donc pris la décision de ne pas mettre de générique début pour entrer directement dans le corps de l’épisode.

Avec un budget serré de 270 000 €, nous avons dû faire des choix esthétiques forts pour pouvoir fabriquer cette série dans de bonnes conditions. Exit donc les décors ! Nous avons fabriqué uniquement les éléments nécessaires à la narration. Pas de couleur dans les personnages qui reste en noir & blanc. L’accent a été mis dans la mise en scène et l’animation traditionnelle.

Au-delà du rôle de producteur de Douce, j’ai aussi endossé le rôle de diffuseur avec le concours d’Idil Fortin et Anaëlle Colas, deux spécialistes de la communication au service du cinéma et de l’audiovisuel sur les réseaux sociaux. D’un commun accord avec TVR, et pour élargir la diffusion de la série, nous avons créé les comptes Instagram, TikTok et YouTube de Douce. Chaque post étant par la suite posté en collaboration avec TVR pour qu’ils puissent reprendre les épisodes et autres posts sur leurs propres comptes. La diffusion a commencé sur Instagram le 20 mai 2025 et les jours suivants sur TikTok et Youtube. N’étant pas spécialiste en la matière, nous avons évidemment fait des erreurs. La durée déjà, 3 minutes est un grand maximum. Certains épisodes de Douce dépassent de quelques secondes les 3 minutes, ce qui les a définitivement exclus de la section « shorts » de YouTube par exemple. Idem pour TikTok où il a fallu couper les épisodes en 2 parties pour respecter le mode de consommation de ce medium. Ensuite, le son… ou plutôt l’absence de son. Beaucoup de spectateurs regardent les réseaux sans casques et la présence des sous-titres est devenue la norme… Encore aurait-il fallu penser à leur place dans l’écran. Et enfin la présence obligatoire des « boutons » sur l’image qui peut venir polluer la mise en scène ou le placement de ces dits-sous-titres.

Après plus de 3 mois de diffusion, nous arrivons à plus d’1,4 million de vues uniquement pour les épisodes et plus de 2 millions de vues en comptant les bonus. Nous partions de zéro aussi nous considérons cette première diffusion comme un succès. Première diffusion, car la série est toujours visible et l’envie de continuer à faire vivre Douce est toujours présente. Nous allons donc travailler à produire une nouvelle saison. Dans quel format ? Seul l’avenir nous le dira.


1 QUESTION À AURÉLIE ROUSSEAU, DIRECTRICE DE TVR

Films en Bretagne :

TVR a soutenu la production de la série Douce (à travers le dispositif TEMPO). Pourquoi TVR s’est-elle engagée sur ce projet singulier de série conçue pour les réseaux sociaux ? De manière générale, quelle vision TVR porte-elle sur les nouvelles formes d’écriture ?

Aurélie Rousseau :

Quand le producteur de Douce, Mathieu Courtois, nous a proposé la série, nous l’avons tout de suite imaginé pour une diffusion réseaux sociaux. Le ton, l’écriture, la proposition visuelle, tout indiquait ce positionnement évident sur Instagram pour nous. Notre média s’est beaucoup développé sur les supports numériques, pour nos programmes info et magazines, il est important pour nous d’expérimenter de nouveaux formats documentaires et fictions aussi sur le numérique.

Douce est une production dont nous sommes particulièrement fiers car elle casse aussi l’image conventionnelle que le public peut avoir d’une TV locale, pour aller sur des sujets où on ne l’attend pas. Ce projet était un pari, nous l’avons porté avec enthousiasme aux cotés de Vivement Lundi !, avec tous les partenaires institutionnels et diffuseurs de la Région et je dois dire que son succès nous envie de recommencer très vite ! 


VOIR LA SÉRIE

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SUR LA SÉRIE

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Douce d’Isabelle Lenoble

9 x 3′ • France • Sortie en mai 2025

Douce, 40 ans, 1 mari, 3 enfants, aux prises avec sa 4ème grossesse. Égoïste, spontanée et immature, Douce n’a qu’un but : être une mère parfaite et une bonne meuf !

Avec les voix de Estelle Meyer, Jean-Claude Rozec, Amine Gaye, Myrtille Zilliox, Djiby Gaye, Raphaële Forêt, Isabelle Lenoble, Benjamin Botella, Julien Leconte Réalisation • Réalisation et scénario : Isabelle Lenoble • Création graphique : Isabelle Lenoble • Musique originale : Denis Vautrin • Montage animatique : Jean-Marie Le rest • Montage son : Kévin Feildel • Mixage : Damien Tronchot

Production : Mathieu Courtois • Une production Vivement Lundi ! en coproduction avec Personne n’est parfait !

Avec la participation de TVR soutenue par Rennes Métropole (Tempo), TVR, Tébéo et Tébésud soutenues par la Région Bretagne. Avec le soutien de la Région Nouvelle-Aquitaine en partenariat avec le CNC.

Distribution : Vivement Lundi !