L’année s’achemine vers sa fin, les jours raccourcissent et l’on ne peut même pas dire que nous n’étions pas prévenus ! Pour nous aider à passer ce cap du déclin, il y a les sempiternelles lumières de la ville et bientôt celles des bougies sur la table, les guirlandes dans le sapin… Mais cette année, il y a mieux encore ! Pour déjouer l’inexorable fuite du temps, on innove et on s’installe sous les étoiles pour un week-end de toiles documentaires (du 9 au 11 décembre), à l’invitation de Comptoir du Doc et de la SCAM.
Il était une fois des auteurs et des images, une société pour les défendre et les promouvoir, et des évènements pour le faire (1). Parmi eux, le Festival des Étoiles est organisé par la SCAM depuis 5 ans au Forum des images à Paris, donnant à voir à un public nombreux – 4500 spectateurs cette année – la sélection de 30 films effectuée depuis 10 ans par un jury indépendant, parmi 400 documentaires environ cette année (2). Ainsi cette récompense est-elle devenue en 10 ans un gage de qualité, qui jouit de la reconnaissance de toute la profession. Ainsi, de très beaux films et de non moins beaux grands reportages bénéficient-ils de plus de visibilité et le public peut-il découvrir sur grand écran un regard pluriel sur le monde. Et rencontrer les auteurs. Convaincus que ces films méritent d’être présentés dans d’aussi belles conditions ailleurs qu’à Paris, certains membres de la SCAM, dont Brigitte Chevet (réalisatrice de documentaires et membre du conseil d’administration de la SCAM depuis 2015), ont pensé délocaliser le rendez-vous en régions : « nous voulions à la fois concourir à développer une culture du documentaire et du grand reportage sur tout le territoire, mieux faire circuler les œuvres de qualité, célébrer la décentralisation audiovisuelle et développer le dialogue entre les régions. »
Vaste et ambitieux programme dont Rennes se fait le premier partenaire pour une expérience de délocalisation du festival au Théâtre de la Parcheminerie, grâce à Comptoir du Doc et au projet que l’équipe a soumis à la SCAM. Brigitte Chevet poursuit : « une fois que le projet de délocaliser le festival s’est précisé, il a fallu trouver une ville, une salle et une équipe pour animer la manifestation. Le savoir-faire de Comptoir du Doc n’est plus à démontrer, l’association travaille toute l’année en lien avec le réseau des professionnels du cinéma et de l’audiovisuel breton, de plus en plus avec les jeunes et les étudiants, et ses nombreux rendez-vous avec le documentaire drainent un public varié. Sans compter qu’avec son écran et son bar, la Parcheminerie se prêtait parfaitement à l’événement. Tout cela place ce premier épisode rennais sous une bonne étoile ! »
Pour Célia Penfornis, coordinatrice de Comptoir du Doc, l’événement s’intègre parfaitement dans les objectifs présents et à venir de l’association : « le projet est né au moment où nous étions en lutte pour rester à la Parcheminerie et où il nous fallait montrer pourquoi un lieu dédié au documentaire et à l’activité de Comptoir du Doc était nécessaire à Rennes. C’était aussi dans notre logique d’élargir les partenariats, y compris à l’échelle nationale. Nous sommes déjà proches de la SCAM, qui nous soutient, et l’opportunité de reprendre une partie de la sélection des Étoiles pour créer un festival bis, modèle réduit, ne pouvait que nous inspirer. C’est exactement le type de partenariat que l’on a envie de développer dans ce lieu, propre à le valoriser. Montrer des films en salles en présence des auteurs, habiter le lieu à tous les étages. »
L’aventure commence donc au printemps, avec la nomination de Marion Geerebaert, chargée de programmation pour Docs au féminin depuis deux ans, qui devient coordinatrice de l’événement. « L’idée d’avoir à mettre en valeur un corpus restreint du point de vue du nombre de films, mais si ouvert du point de vue des regards documentaires, créer des ponts entre les auteurs d’ici et d’ailleurs, c’est ce qui m’a motivée à m’engager. » Dans l’ADN de Comptoir, il y a aussi cette réunion de professionnels du cinéma et de personnes de la société civile. « Notre projet global est participatif, et notre objectif principal, c’est que les gens soient acteurs de ce projet culturel. Tout ça a de l’importance et c’est dans cette philosophie que ce nouveau rendez-vous s’est construit », souligne Célia. C’est donc un groupe de programmation à cette image qui a décidé des sept films étoilés qui seraient projetés. « Nous avons fait ce choix de ne retenir que sept films sur les trente, afin de mettre chacun d’eux en valeur et de profiter de vrais temps d’échanges avec les auteurs, au minimum une demi-heure après les séances », ajoute Marion. Car ces projections seront doublement bien accompagnées : cinq en présence de l’auteur, deux en présence du producteur du film, et toutes par d’anciens étoilés bretons ! Marion dit avoir tenu à « impliquer les auteurs de Bretagne » et elle a prévu de le faire à différents niveaux : au rez-de-chaussée du théâtre, une vidéothèque ouverte au public permettra de voir ou de revoir une quinzaine de films étoilés, réalisés ou produits en Bretagne. « Les Bretons ont été régulièrement distingués, avec huit auteurs et cinq sociétés de production étoilées ces dix dernières années ! » précise Brigitte Chevet. À l’étage, plusieurs d’entre eux ont accepté d’animer les échanges à l’issue des séances. « Il y a là l’idée d’un passage de relais, chère à la SCAM qui pratique déjà l’exercice à Lussas avec les lauréats de Brouillon d’un rêve », précise Marion. Cette vidéothèque éphémère entre en résonance avec la mise en place d’un espace ouvert depuis la rentrée (3), où chacun peut venir visionner un film de la très riche vidéothèque de l’association. Et pour revenir du côté des convives, un réalisateur qu’on ne présente plus en Bretagne tant il lui est fidèle, Christian Rouaud sera présent durant les trois jours : « c’est un peu notre fil conducteur », sourit Marion. « Il accompagnera la séance de Home Sweet Home de Nadine Naous, et celle de Je suis le peuple, d’Anna Roussillon, dont il connaît très bien le travail. Il rencontrera également les étudiants d’études cinématographiques, que j’accompagne dans le cadre d’un atelier de programmation, pour partager son expérience de Président du jury des Étoiles de la SCAM cette année ; je les ai faits travailler sur la SCAM, sur la sélection des films et certains d’entre eux se sont portés volontaires pour co-animer des séances. Il se réjouit également de participer au brunch réservé aux auteurs que nos autres partenaires, l’ARBRE et Films en Bretagne, organisent avec nous le dimanche. Anne Georget, présidente de la SCAM, a elle aussi confirmé sa venue. »
Ce week-end s’annonce donc sous les meilleurs augures. Le Théâtre de la Parcheminerie, défendu pour Comptoir du Doc par tant de gens au printemps et devenu depuis un lieu d’ancrage pour la promotion et la diffusion du documentaire en Bretagne, s’ouvrira pour un nouvel événement, propice aux nouvelles rencontres avec des images, des idées et des gens. Rappelons également que l’entrée est libre pour tous et à toutes les séances !
Rendez-vous est donc pris du 9 au 11 décembre prochain pour habiter le firmament et faire le plein d’étoiles avant Noël.
Gaell B. Lerays
(1) La SCAM est la Société Civile des Auteurs Multimédias. Elle a notamment la charge de répartir les droits d’auteur. Voir un de nos articles sur les questions de droits d’auteurs ici.
(2) Ces films qui concourent pour les étoiles doivent être inscrits au répertoire de la SCAM, télédiffusés dans l’année qui précède le prix. Aucun critère de format ou de sujet ne rentre en ligne de compte, pas plus que le canal de leur diffusion.
(3) Vidéothèque ouverte aux adhérents de Comptoir du Doc à l’accueil du Théâtre de la Parcheminerie, tous les jeudis de 16h à 20h.
Marion Geerebaert, coordinatrice du Festival des Étoiles de la SCAM à Rennes
« Le cinéma et moi, c’est dès l’enfance. » Voilà comment Marion Geerebaert, coordinatrice de ce nouvel événement festif et culturel au cœur de Rennes, évoque sa relation au 7e Art : une histoire d’amour et une évidence dès le départ. À 12 ans à peine, ses parents s’abonnent à Canal +, une aubaine qui la fait plonger dans le noir à la première occasion pour s’éclairer à la seule lumière des films programmés dans des émissions cultes – cinéma de quartier, en particulier – et des rediffusions. Elle sait depuis toujours qu’elle fera quelque chose dans le cinéma mais a d’abord cru que ce serait du côté du montage. Après des études de lettres consenties dans l’espoir d’être prise à la Fémis – section montage, donc ; elle rate le concours de peu – elle passe une maîtrise de cinéma à Rennes, avec « pour mémoire », Le Montage dans Le Fond de l’air est rouge, de Chris Marker, son réalisateur fétiche. Elle suit un atelier, de montage encore, dirigé par Patrick Le Goff (enseignant au département cinéma d’Arts du Spectacle de Rennes 2), qui l’oriente bientôt vers l’INA Atlantique où elle « se confronte à la matière du film » et monte des images d’archives dans le cadre des journées du patrimoine. Malgré un intérêt prononcé pour le documentaire et alors qu’elle suit de loin les actions portées par Comptoir du Doc, elle devient l’assistante de Jacques Froger pour l’éducation à l’image à Clair obscur, poste qu’elle occupera durant 9 années. Elle fait ses armes en travaillant sur les différents dispositifs et les propositions Jeune public dans le cadre du festival Travelling. Marion se forme alors à la conception du webdocumentaire et monte un projet sur 4 ans dans le cadre de Lycéens et apprentis au cinéma, lequel s’achève cette année. Elle devient tout à fait polyvalente, mais l’artistique lui manque, l’écriture, celle de son film, – un projet de film documentaire, évidemment – la réalisation aussi. Elle quitte l’association pour « passer un cap » et participe à une résidence d’écriture à Mellionnec. Ty Films lui permet de faire ses premières armes en matière de réalisation en lui confiant celle d’un portrait : le film s’appelle Les Mots d’Olivier, et Marion en parle comme d’une expérience fondatrice, qui la conforte dans son orientation. Entretemps, elle rejoint l’équipe de Comptoir du Doc en tant que bénévole dans différents groupes de programmation avant de prendre en charge Docs au féminin en 2014. Elle anime cette année un atelier de programmation pour des étudiants de Rennes 2 en section cinéma, une façon de conserver un lien avec l’éducation à l’image qui, dit-elle, « lui tient toujours beaucoup à cœur ». C’est elle qui porte les Étoiles depuis cet été et les liens qu’elle est parvenue à tisser avec les auteurs lui apparaissent déjà comme une belle récompense d’un travail intense : « Lors du Festival au Forum des images, j’ai pu prendre la mesure de l’enthousiasme des auteurs invités ; de mon côté, je retrouve ce plaisir que j’avais dans ce que je faisais avant, le côté festif et collectif d’un événement. »
Pour plus d’informations sur l’événement RENNES SOUS LES ÉTOILES DE LA SCAM !
Le programme détaillé est à télécharger ici.