Depuis quelques semaines, le soulagement a succédé à l’inquiétude chez les professionnels du court métrage et de la filière cinéma. Le Conseil général du Finistère, qui avait annoncé la suppression de son fonds d’aide à la production de fictions courtes, est revenu sur sa décision. Retours sur une remarquable mobilisation du secteur et sur la décision salutaire de l’institution.
« (…) Certains protestent plus fortement que d’autres et mobilisent parfois, sur leurs pétitions, bien au-delà des frontières du Finistère. Cela me rassure sur leur dynamisme et sur leur capacité à travailler en réseau pour surmonter les difficultés de la période (…) ». De qui parlait Pierre Maille, le président du Conseil général du Finistère, en ouverture de la séance plénière du 29 janvier 2015 ? Nul autre que lui ne peut le dire, mais les professionnels de l’image peuvent s’y reconnaître tant ils ont fait preuve d’initiatives pour faire valoir la spécificité et la richesse du territoire en matière de cinéma. Leur élan commun et univoque a surpris les élus, et les a incités à maintenir le dispositif de soutien.
Dès décembre, les communiqués de presse de Films en Bretagne, du Roc (1) et d’Actions Ouest ont donné l’alerte, provoquant un afflux de témoignages et de soutiens en provenance de professionnels de tout profil : auteurs, réalisateurs, comédiens, techniciens, gestionnaires de fonds d’aides, structures de diffusion et de formation, tous concernés ! Ouest-France a consacré une page spéciale au cinéma dans le Finistère, mettant en avant toutes les qualités, talents et compétences du tissu audiovisuel et cinéma local.
Avec les outils de la démocratie participative
En amont du vote budgétaire, le Conseil général du Finistère a présenté l’évolution de ses politiques pour l’année à venir et sollicité l’avis de ses administrés via des rendez-vous citoyens (2). Une délégation de professionnels s’est rendue à l’une de ces réunions publiques pour échanger avec les élus et insister sur l’ampleur des dégâts attendus pour la filière en cas de suppression du fonds. Le jour le plus court et ses très nombreuses projections ont été également l’occasion de faire des annonces au public.
Bien évidemment, les réseaux sociaux ont joué à plein et la page Facebook dédiée est vite devenue l’endroit où relayer l’attachement à la cohérence de la politique jusqu’ici menée sur le territoire breton. Elle a préparé le terrain à une pétition qui a récolté plus de 1 500 signataires en quelques jours.
Films en Bretagne a organisé un débat public lors de son assemblée générale de janvier : une cinquantaine de personnes sont venues partager leurs craintes et leur indéfectible attachement au format court de fiction. Sur l’écran de la salle du Studio, à Brest, l’audience a découvert un montage d’extraits de courts métrages tournés ou aidés par le Département. Cette bande-annonce militante a également été projetée en avant programme sur les écrans d’une poignée de cinémas du Finistère jusqu’à fin janvier.
L’absence d’élus ce soir-là, à Brest, a coupé court au débat démocratique attendu. Qu’à cela ne tienne : la mobilisation a continué via les adresses mails des conseillers généraux. Dans le même temps, la revue Bref et son dossier spécial « dynamique territoriale » sont tombés à point nommé. À quelques jours de la grande messe du court métrage à Clermont-Ferrand, personne ne pouvait plus ignorer l’inquiétude des professionnels.
Statu quo
En séance plénière, le 29 et 30 janvier, le vote des élus du CG 29 s’est fait en faveur du maintien du dispositif et le rendez-vous demandé par l’ensemble des professionnels a été honoré quelques jours plus tard. « Le fonds de soutien persiste dans son enveloppe globale – 150 000 € – et sur la durée du conventionnement en cours avec le CNC, soit jusqu’en 2016 », confirme Florence Magnanon, directrice du service culture, jeunesse et sport. Le soulagement est unanime et salué jusqu’aux instances nationales associées à la mobilisation locale.
Cependant, des incertitudes demeurent quant aux modalités de mise en œuvre du fonds de soutien. La réflexion est en cours, mais d’ores et déjà, l’institution a annoncé sa volonté de solliciter le réseau des professionnels par le biais de sa fédération pour d’éventuels aménagements. La politique audacieuse et vertueuse du département du Finistère en matière de cinéma n’est pas seulement sauvée. Elle est amenée à se co-construire avec ceux qui le fabrique et le font vivre, de quoi se réjouir doublement.
Mais si le maintien d’un fonds d’aide à plusieurs échelons territoriaux (Départements du Finistère, des Côtes-d’Armor et Région Bretagne), et la richesse qui en découle, est une véritable source de satisfaction, il ne doit pas faire oublier la situation très tendue dans les autres régions françaises. À l’approche de la réforme territoriale et de la loi NOTRe (3), les inconnues sont légion quant au redéploiement des fonds de soutien suite au passage à treize régions. Vigilance et cohésion restent de mise…
Elodie Sonnefraud
(1) Le ROC rassemble le SPI, la SRF, le SFA-CGT, l’Agence du court métrage, la Maison du film court, Carrefour des festivals et Sauve qui peut le court métrage. Il s’attache à garantir la pérennité et la diversité de la création et de la production des œuvres de format court, notamment en termes de financement et de diffusion.
(2) http://www.cg29.fr/Agenda/Conseil-general/2014-12-18-et-2014-12-19-Budget-2015-donnez-votre-avis
(3) Projet de loi qui confie de nouvelles compétences aux Régions et qui modifie leur découpage.