Depuis six ans, l’INA Atlantique développe le site « L’Ouest en mémoire » qui, progressivement, s’affirme comme l’une des principales plates-formes web de diffusion de contenus vidéo en Bretagne. Entretien avec Christine Angoujard, directrice de l’antenne Ouest de l’INA.
Pourriez-vous nous retracer les grandes étapes de la genèse de L’Ouest en mémoire ?
Christine Angoujard : Le chantier a été lancé en 2004 suite à l’appel à projet Megalis émanant des conseils régionaux de Bretagne et des Pays de la Loire. Il s’agissait de réaliser la maquette d’une plate-forme de diffusion via le web et de l’expérimenter dans des bibliothèques et médiathèques. Ces dernières avaient été choisies comme cible principale car elles nous permettaient de toucher un public qui nous semblait hétérogène.
L’expérimentation a pris fin en 2007 et le bilan s’est avéré très positif chez les usagers qui soulignaient la convivialité de la maquette. Mais ils soulignaient aussi le manque d’images de « proximité ». À travers cette demande de sujets et de représentation du « chez moi », nous avons découvert cet attachement des publics à leurs réalités locales alors que, paradoxalement, nous avions développé notre plate-forme dans l’optique plus généraliste d’une dynamique Grand Ouest.
Nous avons alors proposé une seconde version (V2) de la plate-forme aux deux conseils régionaux. Cette V2 devait permettre de faire vivre la masse d’archives numérisée par INA Atlantique. La Région Bretagne a donné une réponse favorable très rapidement et la V2 a été lancée en avril dernier.
Qu’est-ce qui différencie ces deux versions de L’Ouest en mémoire ?
Dans la V1 du site, vous aviez accès à une petite centaine de sujets vidéo d’une durée avoisinant les 3 minutes et quelques séquences de 13 minutes. Dans la V2, nous proposons un peu d’archives radio et plus de 450 sujets qui représentent plus de 30 heures de vidéo.
Autres nouveautés dans la V2 : 50 séquences en langue bretonne et la création de parcours éditorialisés à partir d’un thème ou d’un discours.
L’expérimentation nous a également permis de faire évoluer la navigation. Les tests nous ont montré qu’un internaute inexpérimenté va spontanément se promener sur une carte et cliquer sur un territoire qui fait sens pour lui ou l’interpelle directement. Ce constat nous a amené à créer une fresque cartographique sur la page d’accueil du site.
Autre développement : notre souhait de casser la temporalité de la vidéo pour que l’accès à un plan ou une séquence soit facilité en fonction de l’intérêt ou de la sensibilité de l’internaute. Nous avons donc cherché à rendre la vidéo feuilletable comme un livre.
Envisagez-vous de produire des contenus spécifiques pour le site ?
C’est déjà en cours ! Nous avons lancé une première collaboration avec la société Kalanna avec laquelle nous développons un documentaire en langue bretonne. Nous avons travaillé dans un principe d’enrichissement mutuel : nous facilitons l’accès du producteur à nos archives, et le film de 52′, une fois terminé, est accessible sur L’Ouest en mémoire via les différentes entrées du serveur.
Nous travaillons également avec France 3 Bretagne autour du programme en langue bretonne Son da Zont. Il y avait un souhait de faire vivre cette émission musicale au-delà de la diffusion antenne mais le coût des archives pour le web était trop élevé. Nous avons donc trouvé un accord via L’Ouest en mémoire : les archives repérées pour l’émission par son programmateur seront intégrées au site. Ces deux premières collaborations seront en ligne à l’automne.
La langue bretonne semble occuper une place privilégiée sur le site…
La Région Bretagne ayant accompagné financièrement l’INA pour la numérisation des programmes en breton, nous trouvons normal d’accompagner ces programmes pour les rendre plus visibles. Tous les sujets en langue bretonne sont sous-titrés car je crois au bilinguisme pour véhiculer une autre image de cette langue.
Mais nous ne limiterons pas nos collaborations aux programmes en breton. Le soutien de la Région nous a permis de bâtir un socle et maintenant il nous faut enrichir la plate-forme sur un principe de mutualisation, comme évoqué précédemment. Nous sommes ouverts à d’autres apports, à d’autres partenariats avec, par exemple, la PQR ou les télévisions locales.
Quelles évolutions préparez-vous ?
Nous envisageons de faire évoluer les parcours géographiques visuels et nous cherchons des collaborations techniques. Nous souhaitons également faire évoluer l’accès au site via les téléphones mobiles et les smartphones. Nous pensons qu’il existe une audience intéressée par des outils pensés pour fournir de l’information touristique.
Depuis que nous avons lancé le site, nous constatons à chaque phase de son évolution que le gros du travail n’est pas dans la technique mais dans l’ingénierie documentaire. Comme d’ailleurs dans toute offre en ligne, c’est là que réside notre plus gros effort, tant en temps de travail qu’en compétence et en coût. Car, outre le savoir-faire, il requiert des documentalistes chevronnés disposant d’une culture générale étendue.
Propos recueillis par JFLC
L’INA Atlantique présentera L’Ouest en mémoire au Festival de cinéma de Douarnenez et à la SCAM, à Paris, le 13 septembre