Accompagnement des auteurs, une nouvelle structure en Côtes d’Armor


Trégor Cinéma
Les locaux de l'association Trégor Cinéma

Samedi 18 novembre se tient la soirée de lancement de l’association Trégor cinéma. Implantée à Trébeurden, en Côtes d’Armor, elle propose des résidences et du tutorat aux auteurs émergents de courts-métrages (1er et 2è films) et de diffuser des œuvres lors de soirées événements. Rencontre avec son initiateur et président, le cinéaste Fred Gélard.

– Films en Bretagne : Trégor Cinéma s’implante peu à peu dans le paysage : vous étiez présent aux Rencontres de Films en Bretagne pour promouvoir la structure, puis associé à une action pédagogique Talents en court « de l’écrit à l’écran » pendant le festival européen de court-métrage de Brest. La finalité de votre association est l’accompagnement d’auteur mais aussi la diffusion, dont vous donnez un aperçu lors de cette soirée du 18 novembre.

Fred Gélard : Oui, c’est la soirée inaugurale et il nous importait d’y associer le public local et régional au delà des professionnels qui pourront bénéficier des dispositifs d’accompagnement.
Nous l’avons pensée comme une occasion de voir et d’apprécier la force du cinéma en court-métrage. Et pour rappeler combien cet espace de création et de liberté est important pour les cinéastes, ils y font, pour beaucoup, leurs premiers pas. Montrer ces films, qui sont des coups de coeur, qui ont eu de belles carrières en festivals, c’est donner une représentation du type de projets que nous souhaitons accompagner. C’est une entrée en matière pour expliquer ce que va faire l’association, clarifier ses missions et objectifs.

Nous espérons que l’accueil du public sera à la hauteur de l’enthousiasme que nous ressentons déjà à quelques jours de notre premier événement. La presse locale, curieuse de ce qui se met en place sur son territoire, a joué son rôle et la communication que nous menons depuis quelques mois a porté ses fruits, la salle s’annonce pleine.

Ce principe de projections va se répéter dans l’année pendant La fête du Court-métrage, en mars prochain, et lors de la Fête de la musique.

– Le cœur de l’activité de Trégor cinéma est l’accompagnement à l’écriture de projets de films courts. Vous êtes comédien, scénariste et réalisateur et vous avez été lecteur en commission d’aides aux courts-métrages en région Centre-Val de Loire et au CNC. Est-ce là qu’a germé l’envie d’accompagner de jeunes auteurs ?

Je dirais que le premier élément déclencheur a sans doute été le festival de Contis. Mon film Free party y était diffusé (son 4ème court-métrage, ndlr) et dans le cadre d’une proposition Talents en court, je participais à une rencontre entre de jeunes auteurs (porteurs d’un projet de 1er film) et des auteurs plus confirmés. Il s’agissait de porter un regard sur les projets, de donner des conseils, des pistes de travail sur le scénario.
J’ai aimé la relation et ces discussions ouvertes entre des jeunes qui démarrent et des cinéastes plus aguerris. J’ai eu à la fois l’impression de me retrouver en eux, dans leur envie, leur énergie et le sentiment que ce qu’on leur apportait était précieux. Suite à ce rendez-vous, Morad Kertobi m’a proposé de faire partie du comité de lecture de l’avance avant réalisation du CNC. Au delà du plaisir de lire tous ces projets de films, de partager son avis, j’y ai découvert et expérimenté le tutorat proposé à certains projets soumis à la commission (1). Et j’y ai pris goût.
Par ailleurs, en tant qu’auteur j’ai participé à des formations ou résidence, avec Pictanovo, au Groupe Ouest et j’ai pu mesuré combien ces outils et ces périodes dédiées à l’écriture sont essentiels pour progresser et faire avancer ses projets.
En 2016 quand le CNC et son service d’aide à la création ont réfléchi à l’accompagnement des auteurs et lancé de nouveaux dispositifs avec notamment les bourses à la résidence (2), cela correspondait à mon envie d’investir ce champ du compagnonnage de jeunes auteurs. Trégor cinéma est donc né de cette double impulsion.

– Quelle forme prendra ce compagnonnage ?

Nous proposons d’accueillir les résidents individuellement et de manière personnalisée, de partir de leurs besoins, leurs envies, dans l’idée d’être « en intimité avec un auteur et son projet », dans l’échange, le partage et avec une mise à disposition totale du lieu comme des ressources. Dans un premier temps, je serai leur interlocuteur pour cet accompagnement. Il leur sera également proposé de rencontrer des professionnels de la région, des chefs opérateurs par exemple, pour partager leur processus de création. J’ai pu voir sur mes propres projets de films combien l’écriture se travaille en se confrontant à la réalité des autres métiers du cinéma. Échanger sur son projet c’est apprendre à exprimer son envie de cinéma et ça aide à mieux l’intégrer dans le scénario.
Et c’est une manière aussi pour eux de se constituer un réseau, tout comme pour la structure Trégor cinéma de s’inscrire dans le réseau régional et de participer à le tisser.

– Quand démarreront ces résidences ?

L’accueil d’auteurs ayant obtenu une bourse de résidence par le CNC est déjà possible. Grâce au soutien de la Ville de Trébeurden nous disposons de locaux et les premières demandes de résidence nous parviennent. Aucune ne s’est concrétisée pour l’instant : j’ai préféré inviter une première candidate à se tourner vers l’Abbaye de Fontevraud. Elle me semblait plus à même de convenir pour son projet de film d’animation comportant une forte dimension de recherche. Le second avait exprimé un premier choix pour une autre structure et n’est finalement pas venu chez nous. Ces premières demandes sont encourageantes car cette aventure démarre tout juste et que nous ne serons référencés dans les guides de l’accompagnement du CNC ou de Vidéadoc qu’à compter de leur mise à jour en 2018.

Notre objectif pour l’année en cours est donc d’accueillir des artistes bénéficiaires de ces bourses ou des auteurs demandant un tutorat ou un retour sur leur scénario sous la forme de fiche de lecture. Une dizaine d’auteurs en ont déjà bénéficié, et un tutorat est en cours. À la manière de celui mis en place par le CNC, cet accompagnement est envisagé dans le temps, sans date butoir. Il s’agit pour moi de lire et relire différentes versions et pour l’auteur de prendre le temps de creuser les pistes, d’assimiler les changements, de prendre du recul.

En 2018-19, nous espérons, avec le soutien des partenaires publics ou institutionnels sollicités (Département, Région, Drac, SACD), pouvoir lancer un appel à projets pour accueillir davantage de résidents (et cette fois en dehors du dispositif de bourse CNC) et également associer d’autres accompagnateurs à la structure.

Propos recueillis par Élodie Sonnefraud

(1) Les membres du comité de lecture peuvent proposer un tutorat aux projets qu’ils estiment pas encore abouti. Un des membres du comité de lecture prend en charge ce tutorat, rencontre l’auteur pour travailler ensemble sur le scénario, sans délai imposé et avant de se représenter à la commission.

(2) Une réforme des aides au court métrage en 2016 a modifié les dispositifs de soutien à l’écriture avec la création de « bourses de résidences » mises en œuvres par CNC, au bénéfice des auteurs de premiers et deuxièmes courts métrages, et dans le sens d’une plus grande progressivité des aides par le CNC. La commission d’aide avant réalisation peut proposer d’attribuer une bourse de résidence à un auteur ou une aide à la ré-écriture, s’il le juge plus pertinent. L’auteur est libre d’accepter ou de refuser cette proposition. Le CNC pourra l’aiguiller vers la résidence la plus appropriée, le choix revenant à l’auteur, qui perçoit 1 000 euros (tandis que la structure d’accompagnement reçoit 2 000 euros).


Films programmés lors de la soirée inaugurale :

Jour de gloire, de Bruno Collet (Vivement Lundi !)
La queue, de Yacine Sersar (Gulliver productions)
Une vie par coeur, de Lionel Nakache (Darelite 52)
Chez soi, de François Raffenaud (Kepler 22 Productions)
Destino, de Zangro (Bien ou Bien Productions)
Number zéro de Fred Gélard (auto-production)