Depuis le 4 janvier, la Cinémathèque de Bretagne a une directrice. Avec une équipe maintenant au complet, salarié·es, administrateur·trices et président vont pouvoir entamer l’année avec sérénité !
Gaïd Pitrou à 46 ans, et un parcours professionnel riche d’expériences à des postes administratifs et de pilotage de projets dans des institutions liées à la culture[1].
Si dans un premier temps elle a hésité à candidater, elle a vite été convaincue qu’elle y trouverait sa place : « Je souhaitais vivre en Bretagne et cela faisait plusieurs années que j’y cherchais un poste. Au départ je n’avais pas forcément pensé postuler mais c’est en regardant les fonds de la Cinémathèque de Bretagne que j’ai vu que j’allais pouvoir revenir à mes premières amours liées au patrimoine ethnographique.
Mon poste dans le Morvan m’avait permis de travailler autour de la valorisation du patrimoine ethnographique dans un territoire donné, de questionner les identités, la transmission et en regardant les fonds j’étais complètement éblouie et inspirée. Cela m’a donné envie d’y travailler et m’a permis de me sentir légitime, parce que j’avais l’impression que cela conjuguait tout ce que j’aimais faire. J’y retrouvais les problématiques archivistiques que j’ai connues aux archives nationales et dans des musées, assez similaires en termes de conservation et d’inventaire d’un patrimoine pour le transmettre aux générations futures, et la collecte de mémoire, domaine que j’ai pratiqué dans le Morvan. La Cinémathèque de Bretagne, c’est la Bretagne, c’est un territoire, c’est un patrimoine extrêmement diversifié. Là aussi je percevais que ça allait me permettre de revenir au travail de terrain que je faisais beaucoup moins au Ministère de la culture : être en contact direct avec les partenaires, avec les habitants, travailler sur des projets collaboratifs comme la Cinémathèque en monte régulièrement… C’est aussi l’identité bretonne, le patrimoine breton sachant que je suis originaire de Botsorhel (Finistère) mais je n’ai jamais vécu complètement en Bretagne… Plus un territoire est proche de ses origines, plus il est compliqué à questionner finalement. C’est en allant vers le Morvan que je me suis dit que ce que je faisais là-bas, je pourrais peut-être le faire en Bretagne. Parce que cela me permettrait aussi de mieux comprendre le territoire de ma famille… Tout mis bout-à-bout, cela devenait pour moi un poste extrêmement stimulant, passionnant, et je suis vraiment heureuse d’être là ! »
Pour le second entretien d’embauche, les candidat·es devaient proposer un projet pour la Cinémathèque, quel était l’esprit de celui défendu par Gaïd ?
« Il s’agissait, à partir des documents et des entretiens que j’ai pu avoir avec le président, d’identifier à plusieurs niveaux le potentiel de développement et d’accompagnement, en partant du centre névralgique de la Cinémathèque, qui est le travail de l’équipe. Puisqu’un accord d’entreprise est en cours, l’idée est vraiment de produire une analyse partant de l’organisation interne de la Cinémathèque et de l’équipe, à savoir comment l’accompagner pour la réalisation de cet accord collectif, la rédaction du règlement intérieur… Commencer par formaliser une organisation du travail.
En parallèle, il y a la nécessité de poursuivre le travail des collections et aussi d’organiser les relations avec les différents partenaires. Cela doit déboucher sur un projet scientifique : qu’est-ce qu’on fait des collections, comment les conserver, comment les valoriser, avec qui et dans quelle temporalité ? Des actions à mettre en œuvre avec un programme à trois à cinq ans pour avoir une feuille de route interne, et pour les partenaires.
Le troisième point, une fois l’organisation du travail et du projet scientifique et culturel formalisée, c’est au tour du bâtiment : comment organiser les activités, comment développer des actions de service public ? Le bâtiment doit être un lieu de conservation des films, des appareils, mais aussi l’espace de travail et également un lieu pour l’accueil du public et la diffusion.
La Cinémathèque de Bretagne n’a pas de salle de diffusion, n’a pas de lieu pour accueillir des groupes et mener à bien ses missions…
C’est ce que j’avais présenté, avec bien sûr toutes les missions autour des axes pédagogiques. »
Après la soutenance orale qui a convaincu le jury à l’automne, Gaïd est venue s’installer à Brest. Au début de sa deuxième semaine, quels sont les chantiers en cours ?
« Ils sont menés en parallèle et en complémentarité. Dans un premier temps, je fais connaissance avec l’équipe : je rencontre chaque salarié pour qu’il m’explique les missions dont il est responsable, comment elles s’exercent, et qu’elles sont aussi ses envies. Derrière les fiches de poste, il y a les attentes, et les rêves aussi. Parce qu’il est important d’avoir des désirs clairs par rapport à ce qu’on a envie de faire… Après, concrètement, il s’agit de suivre l’accord collectif dont les membres du bureau s’occupent mais dont je dois m’imprégner pour le mettre en œuvre. Et l’urgence c’est aussi de faire un état des lieux des locaux, de la manière dont on les utilise, de leurs limites constatées au niveau de l’organisation du travail comme de la conservation des archives ou et de la diffusion.
Quantifier les choses, les analyser et les objectiver… sans oublier le projet scientifique et culturel qui prendra du temps, puisque l’idée est d’en faire un travail collaboratif avec les équipes et avec les partenaires. Ayant travaillé sur plusieurs projets scientifiques et culturels, je peux m’appuyer sur différentes méthodes mais je ne veux pas arriver avec des choses toutes faites. J’attends de sentir le pouls actuel de la Cinémathèque pour identifier les meilleures à mettre en place… »
Bons vents Gaïd !
Catherine Delalande
[1] Elle a passé ces trois dernières années à la Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France, enchaînant plusieurs missions dont celle de cheffe du bureau des ressources humaines puis de responsable administrative et financière du projet Notre-Dame de Paris. Elle a auparavant été deux ans responsable financière et des ressources humaines de la direction déléguée aux collections de l’INA, a passé deux ans à la Direction générale de la création artistique au Ministère de la Culture, ainsi que trois ans aux Archives nationales pour coordonner et piloter des projets transversaux.
De 2004 à 2010, elle a travaillé au Parc naturel régional du Morvan, à concevoir et mettre en œuvre le projet scientifique et culturel du réseau des 11 musées de l’écomusée du Morvan.
Elle est titulaire d’une Maîtrise de philosophie, d’un DESS Stratégie du développement culturel, d’une Maitrise de droit privé et d’un Master 2 d’administration publique…