À Cannes, à quelques encablures du palais du festival, le pavillon de Film France accueillait les représentants des fonds d’aide régionaux et les bureaux d’accueil de tournages. Endroit idéal pour capter les humeurs territoriales.
Et la tendance était, sans grande surprise, à l’inquiétude. Ici on évoquait la réduction drastique d’un fond d’aide, là on craignait la mise sous tutelle préfectorale d’une dizaine de départements en 2011 pour cause de déséquilibres budgétaires (contrairement à l’État, les collectivités territoriales ont obligation de présenter des budgets équilibrés). Comment se comporteront alors les représentants de l’État quand il s’agira de faire des choix pour revenir à l’orthodoxie budgétaire ? La culture n’étant pas une compétence obligatoire pour les départements, nombreux sont les acteurs du secteur audiovisuel qui exprimaient leurs craintes de voir les budgets culturels des conseils généraux réduits au strict minimum.
La presse professionnelle n’était pas en reste. Consacrant, comme chaque année au moment de Cannes, de nombreuses pages aux « régions côté Croisette », Ecran Total constatait le désengagement partiel de certains départements, même si le cinéma et l’audiovisuel semblent moins touchés que d’autres secteurs culturels. L’hebdomadaire signalait, notamment, la suppression du fonds de soutien au long métrage (80 K€) du département du Finistère et de citer Rodolphe Rohart, chefs du service des arts et territoires : « les soutiens aux arts visuels et vivants ont baissé de 8%. Nous avons essayé de préserver au maximum la création. Mais nous n’avons pas de lisibilité sur les années à venir. » Pour le moment, le soutien finistérien au court métrage n’est pas touché par les restrictions.
Philippe Germain, le directeur de l’Agence du Court Métrage, évoquait clairement les menaces qui pèsent sur les dispositifs d’éducation à l’image (et notamment Collège au cinéma qui est du ressort des départements) et envisageait déjà l’impact négatif sur la diffusion des films courts, malgré le travail de fourmi effectué depuis des années pour que ce genre intègre les politiques d’éducation artistique. L’Agence est l’un des membres fondateurs du BLAC, collectif national de l’action culturelle cinématographique et audiovisuelle, qui milite, entre autres, pour « que la culture devienne une compétence obligatoire des collectivités territoriales » et « pour une reconnaissance du rôle essentiel de la vie associative et de l’éducation populaire sur tous les territoires » (lire l’Appel de Cannes sur www.blac-collectif.org). Des revendications qui devraient trouver un écho en Bretagne où la diffusion culturelle des œuvres audiovisuelles connaît un succès remarqué nationalement (lire le billet du 10/05 sur le Mois du doc).
Heureusement, les visages sereins de l’équipe d’Accueil de Tournages en Bretagne sont venus atténuer cette morosité ambiante. Catherine Delalande et Emmanuelle Lohéac enchaînaient les rendez-vous et les projets de tournages de longs métrages et de fictions télé en Bretagne sont nombreux. Après des années 2007 et 2008 anémiques, notre région semble à nouveau inspirer les réalisateurs et séduire les producteurs.
Jean-François Le Corre