Le 16 mars, la direction de France 3 Nord-Ouest a reçu les producteurs des six régions administratives désormais couvertes par le nouveau pôle de télévision régionale. Compte rendu.
Les producteurs de l’Ouest étaient nombreux à avoir répondu à l’invitation de la nouvelle direction du pôle Nord-Ouest de France 3. Il y avait bien eu quelques grincements de dents bretonnes quand le rendez-vous avait été fixé à Vanves plutôt qu’à Rennes où est située la direction du pôle, mais la présentation du fonctionnement de la nouvelle entité régionale méritait bien quelques kilomètres matinaux. Les professionnels des différentes régions ne purent cependant éviter les commentaires ironiques lorsqu’ils découvrirent que la réunion se tiendrait dans des locaux de… RFO. Dès l’entame de la rencontre, Patrick Visonneau, le directeur du pôle, s’est empressé d’écarter toute polémique, en rappelant, non sans humour, que Paris faisait désormais partie de France 3 Nord Ouest et que « rattacher Paris à la Bretagne, il fallait le faire ! ».
Nouveaux guichets
La nouvelle carte régionale de France Télévisions compte désormais quatre pôles de gouvernance métropolitains intégrant 24 antennes de proximité. Le pôle Nord-Ouest regroupe six de ces antennes : la Bretagne, les Pays de la Loire, la Basse-Normandie, la Haute-Normandie, le Centre et l’île-de-France. Et cette nouvelle organisation a une conséquence immédiate sur le travail des producteurs : là où ils travaillaient auparavant avec trois directeurs de programmes régionaux (Ouest, Normandie, Île-de-France-Centre), ils ont désormais six interlocuteurs que sont les six délégués régionaux aux antennes de proximité.
Si avant cette réforme, les producteurs entretenaient souvent une relation privilégiée avec une antenne régionale, il devient aujourd’hui évident que chaque projet pourra transiter vers France 3 Nord-Ouest via ses différentes antennes en fonction de son sujet, de son lieu de tournage ou de l’implantation du porteur de projet. Un projet qui, l’an dernier, émanait de Bretagne ou des Pays de la Loire était automatiquement envoyé à Rennes à Jean-Michel Le Guennec, alors directeur des programmes de France 3 Ouest. Ce dernier est aujourd’hui coordinateur éditorial du pôle Nord-Ouest et ne recevra donc plus les propositions directement des producteurs, mais via les six responsables d’antennes. Pour résumer : le projet est porté par un délégué régional qui le présente à Jean-Michel Le Guennec. Le coordinateur régional entérine la proposition du responsable d’antenne, si elle lui semble respecter la ligne éditoriale du pôle dont-il est le garant. Un comité éditorial, qui se « réunit tous les deux ou trois mois » examine les propositions validées par Jean-Michel Le Guennec. Enfin, le projet retenu par le comité éditorial redescend au niveau régional où le responsable d’antenne va suivre sa production.
Si le processus de sélection passe maintenant par trois phases de validation, les responsables d’antennes n’ont pas manqué de souligner que les producteurs pouvaient compter sur des interlocuteurs plus nombreux et dont les subjectivités et les lignes éditoriales étaient, de fait, plus diverses que dans l’ancien système. « Ne faites pas l’erreur de croire que tout se passe à un niveau central » a précisé Dominique Delourme, délégué régional aux antennes de Basse-Normandie, « comptez sur le pouvoir de conviction de chaque responsable régional quand il est convaincu par un projet ». Et Jean-Michel Le Guennec de surenchérir : « ne jouez pas la carte des entrées multiples. Appuyez-vous sur une région et son délégué régional pour porter votre projet ».
Enfin, la transmission des projets vers La Case de l’oncle Doc sera désormais de la seule responsabilité du comité éditorial qui choisira parmi ses coproductions lesquelles il souhaite proposer à Alexandre Cazères.
55 documentaires coproduits en 2010
Cette nouvelle organisation n’impliquera pas de nouvelle offre de programmes sur les antennes, ni dans les volumes, ni dans les créneaux horaires. Sur ce sujet, Patrick Visonneau et Jean-Michel Le Guennec n’avaient guère d’annonces inédites à faire. « A minima, 55 documentaires seront coproduits en 2010 par le pôle Nord-Ouest » a clairement annoncé le coordinateur éditorial. Pas de surprise, donc : le pôle reste sur la base des 15 à 20 coproductions annuelles de chacune des trois antennes régionales ancienne formule. « Les apports en numéraires resteront identiques et les apports en industrie ne sont pas remis en cause » a encore précisé Jean-Michel Le Guennec.
Une question brûlait bien évidemment les lèvres des producteurs : comment seront réparties ces coproductions entre les six territoires ? C’est encore le coordinateur régional qui devra veiller à la « péréquation entre les territoires et le nombre de coproductions ». Elle devra tendre « à une meilleure répartition tout en tenant compte de la taille du secteur audiovisuel de chaque territoire ». Et la recherche de cet équilibre pourrait désavantager la Bretagne, région historiquement plus productive que ses voisines.
Les coproductions entre pôles régionaux métropolitains et avec RFO seront envisageables, mais, sans les décourager, Patrick Visonneau a tenu à mettre les producteurs en garde : « cette mutation (de FTV) est complexe et ne s’effectue pas comme par miracle. Il faut s’inscrire dans le temps pour que les choses trouvent leur efficacité, notamment dans le domaine inter pôles ».
En attendant la nouvelle présidence…
Et de la mutation de France Télévisions et du rôle de la direction de l’entreprise, il a été plusieurs fois question lors de cette rencontre. Interrogé par un représentant du Syndicat des Producteurs Indépendants sur la place du pôle dans l’accord documentaire signé entre les syndicats de producteurs et FTV (lire la revue de presse de filmsenbretagne.com), Patrick Visonneau a eu une réponse on ne peut plus nette : « le pôle ne sera pas une structure de négociation corporative avec les producteurs. L’accord documentaire (qui implique la mise en place d’un comité de suivi de la production documentaire par le groupe public) est signé par l’entreprise et le pôle n’aura pas de commission de suivi spécifique ». Jean-Michel Le Guennec de rappeler que « les chiffres sont transparents et qu’ils sont transmis à la direction de FTV pour que le suivi soit assuré au niveau central ».
Dans les propos des deux directeurs, il est apparu comme probable qu’une nouvelle phase de réflexion sur la stratégie éditoriale du pôle sera enclenchée après la nomination du nouveau président du groupe. « Une réflexion de fonds est amorcée par l’antenne nationale sur l’offre de France 3, et l’offre régionale n’échappe pas à cette réflexion ».
Cette première réunion, initiée par l’Association des Producteurs des Pays de la Loire, a permis l’instauration d’un dialogue courtois et direct entre le nouvel organigramme de France Nord-Ouest et les producteurs de ce nouveau bassin d’activité dessiné par le diffuseur régional. À la fin de cette matinée, l’idée d’un prochain rendez-vous permettant d’évaluer la mise en place de ces nouveaux protocoles de travail entre la chaîne et la production indépendante a été évoquée.
Jean-François Le Corre
PS : La question des web TV régionales a également été évoquée durant cette rencontre. Nous y reviendrons dans un prochain billet.