La « vitrine biennale de l’animation française » organisée par l’Association française de cinéma d’animation s’implante en Ille-et-Vilaine.

C’est mercredi 23 décembre que l’affaire semble avoir été conclu entre l’Association française de cinéma d’animation (Afca) et le maire de Bruz. Selon des informations recueillies par le quotidien ouest-france, le Festival national du film d’animation, qui n’a pas eu lieu depuis avril 2007, sera accueilli du 14 au 19 décembre 2010 par la commune du bassin rennais.

Les cinq précédentes éditions de cette biennale s’étaient tenues à Auch, mais il était de notoriété publique chez les professionnels de l’image animée que l’Afca cherchait une ville plus attractive pour implanter sa manifestation. Lors du festival international du film d’animation d’Annecy 2008, les rumeurs qui couraient entre les séances étaient affirmatives : après des contacts avec Lille et avec la Région Centre, c’était finalement la Ville de Rennes qui accueillerait le festival national. Pour les Rennais, cette arrivée avait déjà été annoncée quelques semaines plus tôt dans le programme du candidat Daniel Delaveau pour les municipales. Lors de la campagne, la délocalisation totale de l’Association française de cinéma d’animation de Paris à Rennes était même régulièrement évoquée. Après l’élection de Daniel Delaveau à la mairie de Rennes, ce projet de décentralisation d’une association nationale, semble avoir été revu à la baisse pour un simple accueil de la biennale.

Malgré tous ces clignotants qui semblaient au vert, les Rennais ne virent pas le moindre festival de cinéma d’animation s’implanter dans leur ville en 2009. Et sur le site de l’Afca, les informations restent à ce jour pour le moins sibyllines : « le festival quitte la région Midi-Pyrénées et sera accueilli par une nouvelle ville ». L’article de ouest-france relate que les négociations entre l’Afca et l’adjoint rennais en charge de la culture n’ont pu aboutir à de « réel engagement ». La situation budgétaire des collectivités locales particulièrement tendue en cette fin d’année 2009 serait-elle la principale cause de cette difficulté de la Ville de Rennes à s’engager clairement ? Les tensions créées dans le monde associatif rennais par l’annonce de cette arrivée d’un nouveau festival dans une commune qui compte déjà trois événements consacrés au cinéma (Travelling, Images de Justice et CourtMétrange) auraient-elles interféré dans la prise de décision de la municipalité ?

Une dynamique métropolitaine

Quoi qu’il en soit, le Festival national du film d’animation a fini par trouver une écoute plus favorable auprès de la Ville de Bruz, située à 14 km au sud de Rennes. « À Bruz, il y a une vraie volonté de nous accueillir et de nous donner les moyens de réussir » confie à ouest-france Denis Walgenwitz, le président de l’Afca. « Pour le festival, nous sommes soutenus par le CNC, centre national du cinéma et de l’image animée, nous avons aussi un accord de principe de la Région Bretagne et de Rennes Métropole pour nous aider » souligne-t-il, « il nous manquait une ville dans la Métropole pour nous accueillir. »

Si l’implantation de la manifestation en Ille-et-Vilaine semble désormais bien engagée, des questions demeurent. Pourquoi cette « vitrine » à vocation nationale quitte-t-elle une ville de 21 500 habitants pour s’implanter dans une commune qui ne compte que 14 200 âmes ? La période, qui voit le budget du département durement touché par la crise économique et la réforme des collectivités territoriales, est-elle propice ? Où se trouve la plus-value d’un tel déplacement pour l’Afca ? Certains évoquent la dynamique qui existerait autour du cinéma d’animation sur le bassin rennais, d’autres la qualité du public breton qui manifeste régulièrement son intérêt pour la Fête nationale du cinéma d’animation, autre événement porté par l’association nationale. Le travail sur le terrain effectué depuis plusieurs années par l’association rennaise L’Arrosoir à Emile, partenaire régional de l’Association française de cinéma d’animation, a également pesé dans la balance lors du choix du lieu d’implantation. Mais c’est peut-être dans les dernières phrases de l’article du quotidien régional qu’il faut chercher les principaux éléments de réponse et l’ambition du projet de l’Afca. Si Bruz deviendra « le coeur de ce festival, (…) dans la dynamique de l’agglomération, des films seront aussi projetés dans d’autres communes. Il y aura bien sûr aussi des choses à Rennes… ». Enfin, la biennale pourrait évoluer en manifestation annuelle.

C’est donc une dynamique métropolitaine qui serait enclenchée et, finalement, préférée à une nouvelle manifestation rennaise. Or, la communauté d’agglomération Rennes Métropole « pèse », elle, plus de 384 000 habitants. Enfin, pour évaluer les potentialités de ce choix à moyen terme, il faut prendre en compte deux autres projets qui semblent se dessiner à Rennes, en parallèle de l’arrivée de ce nouvel acteur dans le bassin. L’idée d’un lieu audiovisuel mutualisé porté par les associations Clair-Obscur, L’Arrosoir à Emile, CourtMétrange et Comptoir du Doc, longtemps considérée comme utopique, est désormais évoquée par René Jouquand, l’adjoint à la culture rennais (lire Le Mensuel de Rennes de décembre 2009). Autre projet qui occupe les conversations, la création d’une « cité du numérique » impliquant, notamment, des acteurs liés au Pôle de compétitivité Images et réseaux. Les prochains mois pourraient donc voir s’amorcer une forme de recomposition du paysage audiovisuel et cinématographique local. Et l’animation, genre associant depuis longtemps 7e Art et création numérique, pourrait se retrouver aux croisements de nombreuses problématiques…

Jean-François Le Corre
Illustration : détail de l’affiche du Festival national du film d’animation 2007 © Afca